Existe-t-il une pornographie égalitaire ?

La pornographie a mauvaise réputation. Elle entretiendrait des rapports inégaux entre les femmes et les hommes, voire inciterait aux violences sexuelles. Des féministes comme Andrea Dworkin et Catharine MacKinnon dénoncent la mise en scène de la domination des hommes, en infligeant aux femmes des traitements sexuels dégradants comme l’éjaculation faciale, entre autres. Des idées erronées, à en croire le sociologue Florian Vörös. Ses analyses invitent à dissocier les intentions (mettre en scène la domination des hommes) de leurs supports (la pornographie). Ce n’est pas la pornographie qui produit les rapports de domination ou engendre les violences sexuelles : elle reproduit un ordre social existant, projeté à travers elle. Ceux qui dénoncent le sexisme ou la misogynie et en attribuent la cause à la pornographie se trompent de cible. Elle pourrait transmettre d’autres images des rapports humains : en montrant des hommes réputés dominants sous leurs aspects les plus vulnérables, ceux de l’abandon au plaisir et de la jouissance ; ou des femmes réputées dominées comme actrices majeures de cette vulnérabilité. Une entreprise déjà testée par la pornographie qui se revendique féministe.

Les analyses de Thierry Hoquet le confirment : la pornographie n’est pas misogyne en soi. Le philosophe s’appuie sur l’exemple du porno gay. « Si toute pénétration est domination, une copulation gay n’est-elle pas l’extension à certains hommes de l’asservissement dont sont déjà victimes les femmes ? À l’inverse, dès lors que certaines pratiques sont mutuelles et/ou potentiellement symétrisables, peut-on maintenir l’analyse inégalitaire et l’hypothèse de la domination phallocentrique ? » De là à ériger le porno gay promoteur de l’égalité des sexes, il n’y a qu’un pas !

 

• « Les ados et le porno : analyse d’une controverse »
Florian Vörös, La Santé de l’homme, n° 418, mars-avril 2012

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