Géopolitique de l'espace

Le début du 21e siècle marque une nouvelle ère de la conquête spatiale. Satellites, vols, programmes d’exploration se multiplient sur fond de rivalités entre puissances mondiales. Faut-il craindre une guerre spatiale ? Quels défis nous attendent dans les années à venir ?

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Le 21e siècle, le deuxième siècle de l’espace ?

Depuis quelques années, le paysage spatial a connu des transformations spectaculaires et annonciatrices de ce que sera la première partie du 21e siècle au-dessus de nos têtes. En janvier 2019, un engin chinois s’est posé pour la première fois sur la face cachée de la Lune. En mai 2020, des astronautes ont été, pour la première fois, envoyés dans l’espace par une société vers la Station spatiale internationale (SSI) par une société privée. En juillet, un pays du Moyen-Orient (les Émirats arabes unis) a pour la première fois lancé une sonde vers une autre planète. En décembre, la Chine récupérait des échantillons de sol lunaire. En mars 2021, l’engin américain Perseverance réussissait deux « premières » sur une autre planète : un vol aérien, celui d’un microhélicoptère, et la production de petites quantités d’oxygène. En avril, Moscou annonçait que la Russie se retirerait de la SSI en 2025 et construirait sa propre station, et Pékin entamait la construction de sa station nationale. Ces stations ont un intérêt scientifique, mais la SSI symbolisant également la coopération internationale dans l’espace, de tels projets augurent d’une certaine « renationalisation » de ces derniers.

Le 21e siècle promet d’être celui d’un véritable saut quantitatif et qualitatif. Les objets en orbite sont de plus en plus nombreux avec le développement des micro et nanosatellites (eux-mêmes lancés par des engins plus petits). De nouveaux États deviennent des puissances spatiales : le Japon, l’Inde, les Émirats arabes unis… Près de soixante États au total ont des activités spatiales.

Surtout, les entreprises privées deviennent des acteurs essentiels. Ce sont elles qui, avec le soutien des agences gouvernementales, notamment aux États-Unis depuis la fin de la navette en 2010 – qui servait à déposer et entretenir des satellites, et à transporter des passagers vers la SSI, mais qui devenait obsolète –, sont à l’origine de ce deuxième âge spatial. À l’ère des petits satellites et des lanceurs réutilisables, le coût de mise en orbite devient plus accessible. Quant au coût de développement des lanceurs, la politique de « prix fixes » de la Nasa 1 a permis de le diviser par dix. Les principales sociétés concernées pourraient devenir de véritables Gafam 2 de l’espace. Elles ont été créées par des entrepreneurs inventifs ayant fait fortune dans le numérique, qui ont ensuite pu fonder des sociétés à la fois porteuses d’innovations et prestataires de services. Les plus connues sont Space-X, Blue Origin, ou encore – loin derrière – Virgin Galactic. S’y ajoutent nombre de sociétés plus discrètes telles que Kongsberg Satellite Services, qui dispose d’un réseau de 200 antennes terrestres, ou des start-up de l’espace telles que Loft Orbital avec ses microsatellites YAM. D’autres sociétés ont bénéficié de la nouvelle gestion des programmes par la Nasa telles que Northrop Grumman avec son lanceur Antares et le véhicule de ravitaillement Cygnus. 

De Soyouz à SpaceX, des leaders du transport spatial

Si l’espace connaît un nouvel essor, c’est d’abord du fait du succès de l’entreprise américaine SpaceX. Cette société, créée en 2002 par Elon Musk, a conçu et commercialisé le lanceur réutilisable Falcon-9. C’est avec elle que la Nasa a signé son contrat de fret vers la SSI. SpaceX a ainsi brisé le monopole du russe Soyouz, spécialisé dans l’acheminement d’astronautes vers l’espace. SpaceX est aussi devenue en quelques années leader des lancements de satellites avec 70 % du marché et trois fois plus de lancements qu’Ariane en une seule année. Elle développe par ailleurs des projets d’exploration vers la Lune et Mars, et le programme Starlink d’accès à haut débit à Internet par satellites. Et elle bénéficie d’un sens inégalé de l’esthétique et de la communication. 

Elon Musk, entrepreneur disruptif

Né en 1971 en Afrique du Sud, Elon Musk n’en finit pas de surprendre. Entrepreneur visionnaire, il veut changer le monde et l’humanité avec des projets de développement durable. En 2008, il a ainsi pris le contrôle de la société de voitures électriques Tesla. Puis, il a créé la société de paiement en ligne Paypal. Avec l’entreprise de transport spatial SpaceX, l’entrepreneur ambitionne à terme de coloniser Mars.

Marié à plusieurs reprises, E. Musk n’a pas moins de six enfants dont le dernier, né en 2020, porte un nom très futuriste : X Æ AXII (X pour la variable inconnue, Æ signifiant l’intelligence artificielle – AI - en langue elfique et A12 du nom d’un avion précurseur du SR71, avion « le plus cool de tous les temps » selon E. Musk). En mai 2021, l’entrepreneur a déclaré être atteint du syndrome d’Asperger.