Jeanne Lazarus : Comment l'État veille sur votre argent

Depuis les années 1960, l’État s’appuie sur les banques pour sécuriser les finances des ménages, notamment les plus modestes. Avec la privatisation du secteur bancaire, l’encadrement a laissé place à une logique de responsabilisation, anxiogène et peu efficace.

Dans Les Politiques de l’argent, vous vous penchez sur la manière dont l’État encadre l’argent des ménages, carburant de la consommation. De quand ces politiques datent-elles ?

Elles remontent aux années 1960, au moment où les pouvoirs publics encouragent les ménages à recourir au compte bancaire. Les lois Debré de 1966-1967 simplifient l’ouverture des guichets : en cinq ans, le nombre de ménages possédant un compte passe d’à peine 20 % à 75 %.

Les plus grandes banques sont alors des entreprises publiques et ont pour mission de s’ouvrir aux particuliers, avec des produits bancaires peu nombreux et extrêmement régulés. La sphère publique, en lien avec le secteur privé, œuvre à la stabilisation des finances des ménages par l’épargne, notamment pour le logement ; par l’apprentissage de l’usage des outils bancaires ; et un développement prudent, mais réel du crédit à la consommation, comme immobilier. Les assurances sociales ont sécurisé l’argent des ménages du côté de la production ; les banques ont la mission de le faire du côté de la consommation.

Comment ces politiques ont-elles évolué ?

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Ce modèle est ébranlé à partir des années 1980 et surtout 1990 par la libéralisation de la réglementation puis la privatisation des banques, qui prennent un tournant commercial : les usagers deviennent des clients à qui il s’agit de vendre des produits financiers.