L'Amérique que nous voulons

Paul Krugman, Flammarion, 2008, 352 p., 22 €
La société américaine est aujourd’hui aussi inégalitaire qu’au début du XXe  siècle. Pour Paul Krugman, prix Nobel d'économie 2008, c’est le résultat de la politique délibérée d’une coalition de conservateurs, attachés à effacer toute trace du New Deal.

 

Paul Krugman est l’un des économistes américains les plus brillants de sa génération. C’est aussi un éditorialiste fameux qui, depuis les colonnes du New York Times, a porté des attaques d’une rare férocité contre l’administration de George W. Bush.

Laquelle de ces deux facettes l’a emporté lors de la rédaction de L’Amérique que nous voulons ? Celle de l’analyste circonspect des données économiques ou celle du pourfendeur enflammé du conservatisme ? Eh bien… ni l’une, ni l’autre. Dans ce plaidoyer pour un nouveau New Deal, les deux Krugman se prêtent main-forte. L’un étaye l’argumentation avec des recherches fiables, l’autre en tire sans ambages les conclusions qui s’imposent. Il en ressort une chronique percutante de l’évolution des inégalités sociales et des conflits raciaux dans le XXe  siècle américain, qui débouche droit sur les enjeux de la prochaine élection présidentielle.

Point de départ de P. Krugman : l’année 1920. Dans les dernières heures de « l’âge doré » du capitalisme américain, les fortunes de quelques Rockefeller, Carnegie et Mellon coexistaient avec les conditions de vie précaires de la majorité des Américains. Les 10 % les plus riches percevaient alors plus de 40 % du revenu national.

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Puis est venu le New Deal du président Franklin Roosevelt, petit cataclysme pour les plus fortunés : en 1950, les 10 % les plus riches percevaient un revenu après impôts inférieur de 20 à 30 % à ce qu’il était dans les années 1920. Devenues majoritaires, les classes moyennes nageaient dans l’American Dream, avec leurs pavillons de banlieue, leurs petits jardins et leurs voitures.

Retour à la période contemporaine : en 2005, la répartition des richesses est très exactement identique à celle de 1920. Pis, de nos jours, le revenu moyen n’est tiré vers le haut que par la prospérité des multimilliardaires à la Bill Gates. L’Amérique du milieu stagne et les travailleurs pauvres tentent de rester à flot.