Fumeuse ou non-fumeuse ? Catholique ou sans religion ? Brune ou blonde ? Ça y est, j’ai enfin créé mon profil sur Meetic, le célèbre site de rencontre par Internet. Comme tant d’autres personnes, j’ai bon espoir d’y trouver l’homme de ma vie. Ces sites affichent, en effet, des taux de fréquentation vertigineux. En 2017, Tinder, le dernier venu, revendiquait fièrement 50 millions d’utilisateurs dans le monde 1. Ces chiffres relèvent surtout du marketing. Mais la sociologue Marie Bergström, l’une des rares chercheures à étudier sérieusement la question, confirme l’importante fréquentation de ces plates-formes : en 2013-2014, un Français sur six s’y était déjà inscrit, avec l’objectif d’y rencontrer l’âme sœur 2.
Voilà qui marque un profond changement dans nos pratiques. Non que la marchandisation des rapports amoureux soit nouvelle. Dès le 19e siècle apparaissent les premiers journaux spécialisés dans les petites annonces de rencontres 3. C’est aussi l’époque où sont créées les agences matrimoniales 4. Mais ces dispositifs sont longtemps restés marginaux. Dans les années 1980 encore, souligne M. Bergström, moins de 2 % des 21-44 ans avaient fréquenté une agence matrimoniale. Aujourd’hui au contraire, les sites de rencontres se sont imposés dans le paysage, profitant notamment du nombre croissant de célibataires.