« Il est intelligent ce petit, il apprend bien à l’école. » Une opinion très répandue veut que la réussite scolaire dépende de l’intelligence. Et si c’était le contraire ? Et si c’étaient les connaissances scolaires qui rendaient plus ou moins intelligent ?
Admettons que l’intelligence se manifeste par la capacité d’analyser, de comprendre et de répondre de façon adaptée aux situations auxquelles l’on est confronté. Un jeune qui n’a suivi que la scolarité obligatoire a été confronté pendant douze ans de sa vie à des situations d’apprentissage dans lesquelles on lui a expliqué ce qu’il devait savoir. Cette durée passe à vingt ans au minimum pour le titulaire d’un master. Peut-on imaginer que cette somme considérable de connaissances n’a aucune influence sur la façon dont nous analysons, comprenons les situations et y répondons ?
Des psychologues, Jacques Grégoire par exemple (1), ont montré que les différences individuelles d’efficience intellectuelle pouvaient être dues à des fonctions générales comme la vitesse de traitement et la capacité de la mémoire de travail. Les recherches qui ont comparé « experts » et « novices » dans différents domaines montrent que les premiers sont plus rapides que les seconds et que la capacité de leur mémoire de travail est supérieure. Or en quoi se distinguent-ils, sinon par leurs connaissances qui font précisément que les uns sont experts et les autres novices ?
Si l’on admet cette relation, en quelque sorte inversée, entre intelligence et réussite scolaire, le problème de savoir pourquoi certains apprennent facilement et d’autres plus difficilement reste entier. Les recherches récentes en psychologie cognitive commencent à lever le voile sur cette énigme. Elles mettent notamment en évidence la diversité des démarches employées par les individus (et donc les élèves) et le rôle déterminant de leurs représentations pour élaborer leurs propres stratégies d’acquisition de connaissances. Ce facteur semble constituer un élément essentiel pour une meilleure compréhension de la (non-)réussite scolaire et des différentes évaluations qui sont faites des élèves, aussi bien à l’école que dans la passation de certains tests destinés à évaluer leur niveau.
Une conception classique de l’apprentissage scolaire peut se résumer au schéma suivant : l’enseignant explique la notion à acquérir puis propose des exercices dits d’« application ». Si l’élève donne les « bonnes réponses », on conclut que la notion est acquise, sinon on considère qu’elle ne l’est pas et qu’il convient de reprendre l’explication. Cette manière de faire est pourtant déjà une source d’importants malentendus pédagogiques.
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