L'homme qui vola sa liberté

L’Homme qui vola sa liberté. Odyssée d’un esclave, Gísli Pálsson, Gaïa, 2018, 316 p., 22 €.

Le nom de Hans Jonathan, paraît-il, n’est pas inconnu des juristes danois. Son cas fit l’objet, en 1802 à Copenhague, d’un retentissant procès l’opposant à sa propriétaire légitime, Henrietta Cathrina von Schimmelmann, laquelle prétendait récupérer son bien et le renvoyer vers sa plantation natale de l’île Sainte-Croix, à l’époque possession danoise des petites Antilles. Car Hans était un esclave, né dix-sept ans plus tôt des œuvres furtives d’un secrétaire blanc et d’Emilia Regina, esclave noire de la famille des planteurs Schimmelmann. Hans était donc, dans la taxinomie de l’époque, un mulâtre. Il avait reçu une assez bonne éducation, savait lire, écrire, compter, jouer du violon et parler plusieurs langues. Après que ses maîtres avaient quitté leur île, il les avait rejoints à Copenhague. Était-il encore un esclave ou bien un simple domestique ? Les lois n’étaient pas claires, c’était là tout l’objet inédit du procès. Entre-temps, Hans avait pris l’initiative, s’était engagé dans la marine danoise et avait combattu les Anglais. Malgré ses faits d’armes, le tribunal estima qu’il devait être revendu aux Antilles. Cet épisode funeste de la vie de Hans Jonathan méritait à lui seul le récit que lui consacre l’anthropologue Gísli Pálsson, témoignant d’une époque où la traite et l’esclavage dans les colonies devenaient des objets de controverses juridiques et morales en Europe continentale. Mais ce n’est qu’un début dans l’étonnant destin de cet homme.