L’Ancien Monde porte bien son nom. C’est en effet dans l’espace réuni de ces « vieux continents » – l’Afrique et l’Eurasie – que s’est déroulé l’essor de l’humanité, bien longtemps avant que l’Océanie puis les Amériques entrent en scène. Et l’Afrique, parmi cet Ancien Monde, joue un rôle primordial à plusieurs moments-clés de cette évolution.
Car l’Afrique est bien le berceau de l’humanité. C’est là, dans ses savanes orientales et ses hauts-plateaux méridionaux, qu’ont été trouvés les plus anciens fossiles d’hominiens, datant de 6 millions d’années, d’Orrorin à Homo habilis en passant par toute une cohorte d’Australopithèques ; c’est encore de là, vers 1,8 million d’années, que partira en direction de l’Eurasie et de ses péninsules l’un de leurs descendants, Homo erectus ; et c’est toujours en Afrique que, aux environs de 300 000 ans, émergera celui qui allait clore la lignée humaine, Homo sapiens, dernier venu finissant par recouvrir (ou absorber, selon les cas) les autres formes d’humanité, tout en achevant de peupler la Terre.
Nous sommes tous africains
Les recherches des soixante dernières années ont imposé la contribution cruciale de l’Afrique à l’histoire de l’humanité. Nous savons désormais que toutes les populations humaines de la planète, depuis déjà quelques dizaines de millénaires, y puisent leurs racines de sapiens. Bien sûr, il faut tenir compte de l’influence d’autres parties du monde, ne serait-ce que dans les adaptations qu’elles conditionnèrent. Certaines ne furent pas sans conséquences sur la physiologie des populations concernées – citons par exemple la couleur de peau, dont la pigmentation est largement influencée par le milieu. Bien sûr, il faut aussi admettre la contribution d’autres formes d’humanités disparues depuis trente mille ans au moins, tel que Néandertal en Europe, ou bien encore les Dénisoviens asiatiques. Cela si l’on en croit certaines analyses paléogénétiques récentes, qui indiquent que certaines populations actuelles, pour parfaitement sapiens qu’elles soient, en conservent toujours un peu la trace sous forme de quelques fragments d’ADN.
Mais le tribut à l’Afrique reste entier. Car, quoi qu’il en soit, tous ces protagonistes de la lignée humaine sont eux-mêmes les lointains descendants de populations d’Homo erectus, issues de ce continent quelques centaines de millénaires plus tôt. Nous sommes tous d’une même espèce, dont les ancêtres communs sont indiscutablement africains.
Travailler sur la Préhistoire africaine pose donc un problème singulier : on ne touche jamais vraiment le commencement de l’humanité. Toujours, existe un avant. Depuis des millions d’années, tous les acteurs de cette évolution, aussi lointains qu’ils nous paraissent, sont peu ou prou les héritiers de lignées antérieures ; aucun ne surgit, tous procèdent de lentes transformations amorcées préalablement, selon des trajectoires souvent difficiles à démêler.