Franz de Waal place l’empathie au cœur de son analyse du comportement social. Pour lui, le développement de cette capacité à « éprouver les mêmes sentiments que l’autre » expliquerait l’émergence de la coopération chez les animaux sociaux et chez les humains. L’empathie se cacherait ainsi derrière des phénomènes aussi différents que la contagion émotionnelle, l’instinct parental, la sympathie, la compréhension des pensées d’autrui ou encore la morale. Mais est-ce vraiment le cas ?
Prenons d’abord ce que l’on appelle « la contagion émotionnelle » : un individu est effrayé par un danger, les congénères qui l’entourent remarquent sa peur et deviennent nerveux à leur tour. La peur s’est donc répandue. Est-ce parce qu’ils ont mobilisé une capacité à éprouver un sentiment identique ? Pas nécessairement. Un mécanisme d’alerte peut l’expliquer. Dans les espèces sociales, les individus d’un même groupe sont menacés par les mêmes dangers. Il est donc tout à fait naturel pour un individu de se placer en état d’alerte lorsqu’il remarque que son voisin montre des signes de nervosité. La peur ne se propage pas parce que les individus éprouvent les mêmes sentiments, mais parce qu’ils ont les mêmes raisons d’éprouver ces sentiments.