Les travaux personnels encadrés. Un espace de travail autonoe au lycée
« L’homme et la nature », « L’image, arts, littérature et politique », « La presse écrite », « Les entreprises et leurs stratégies territoriales », « La famille »…, tels sont quelques-uns des thèmes proposés cette année à la réflexion des élèves de première dans le cadre des TPE et qu’ils peuvent réaliser sur un support de leur choix : dossier, diaporama, CD-Rom…
Depuis l’année 2000, les TPE sont inscrits à raison de deux heures hebdomadaires en première et font l’objet d’une épreuve orale obligatoire au baccalauréat anticipé : seuls les points supérieurs à la moyenne sont retenus. Selon les textes officiels, les TPE doivent permettre aux élèves de « mener un véritable travail en partie collectif qui va de la conception à la production achevée ». Ils doivent associer deux disciplines et supposent donc la collaboration de deux enseignants. Une professeure de lettres et son collègue d’histoire-géographie, proposent par exemple à leurs élèves de traiter un sujet « qui les relie au passé, au présent ou au futur de notre monde (1) ». Les résultats témoignent de la créativité des élèves : « Avec les filles, raconte l’un d’eux, nous discutions sur notre thème, la représentation de la guerre, et nous avons dérivé vers la musique et notamment Eminem (…). Anne-Lyse a proposé comme sujet “La censure et son évolution” ; j’ai trouvé que c’était une idée excellente surtout qu’elle est très présente de nos jours. » D’autres décident de travailler sur « l’euphorie des années folles ». Leur production comprend, entre autres, une valise contenant des objets témoins de cette période, à la manière des objets du cabinet d’André Breton dont une photo recouvre le couvercle : « Ceinture de bananes de Joséphine Baker, statuette nègre, bouteilles d’alcool en tout genre, poèmes surréalistes, mais le fond de la valise est un cimetière de guerre, fond vert et croix blanches. » Cette enseignante souligne le plaisir que les élèves ont éprouvé à confronter leurs points de vue pour aboutir à une production commune. Un certain nombre de professeurs ont accueilli cette innovation très favorablement. Jacqueline Gérard souligne cependant les difficultés qu’elle constitue pour certains, habitués à prendre plaisir à la préparation de leurs leçons. Beaucoup de professeurs ont été réticents devant cette manière de travailler, pourtant courante dans les pays anglo-saxons ou en Europe du Nord. Elle suppose en effet de réagir au travail proposé par les élèves pour l’améliorer ou le corriger plutôt que de leur dispenser un savoir totalement élaboré et contrôlé par l’enseignant. Cette réticence, qui porte aussi sur le mode d’évaluation, explique que les TPE, un temps proposés également en terminale, sont désormais réservés à la classe de première.
NOTE
(1) Jean-Michel Zakhartchouk (coord.), « Pratiquer les IDD, les TPE, les PCPP », Cahiers pédagogiques, n° 413/414, avril-mai 2003.
Le collège et lycée élitaire pour tous (CLEPT)
Premier étage d’un immeuble, quartier populaire de Villeneuve, Grenoble. Un long couloir, cinq ou six classes, une petite cuisine pour faire chauffer du café : dans ces locaux très simples, le Clept, établissement public de l’Éducation nationale, a pris racine en 2000. La sobriété des lieux est revendiquée par la direction : ce cadre non formel convient mieux au public accueilli ici – des élèves « décrocheurs », en rupture avec l’institution scolaire depuis parfois quatre ou cinq ans…
Julien, 17 ans, a abandonné en seconde. Souhaitant rompre avec un quotidien fait de petits boulots alimentaires, il a frappé à la porte du Clept. Ils sont environ 90 jeunes de 14 à 22 ans, tous volontaires et recrutés sur entretien. Le Clept propose une troisième ainsi qu’un enseignement de seconde, première et terminale générales, sections L, S ou ES.
« Dispenser auprès des élèves un enseignement classique est fondamental, considère Bernard Gerde, directeur de l’établissement, ne serait-ce que pour sortir ces jeunes d’un certain sentiment de marginalité. » L’enseignement est délivré sur le mode classique avec les mêmes exigences (disciplines, programmes, découpage traditionnel en classes de la troisième à la terminale). C’est plutôt l’ambiance et l’esprit dans lesquels on y travaille qui font la spécificité de cet établissement. Les petits effectifs (15 élèves par classe) permettent de prendre en compte l’hétérogénéité des jeunes qui ont droit par ailleurs à un suivi personnalisé grâce à la présence de professeurs-tuteurs et d’une équipe enseignante disponible…
Ce qui fait aussi la particularité du Clept, ce sont les ateliers culturels (vidéo documentaire, archéologie, sciences et techniques, urbanisme, théâtre…) auxquels participent tous les élèves, et qui débouchent à la fin de l’année sur des expositions et spectacles. L’an dernier, les élèves ont présenté Roméo et Juliette au théâtre de Grenoble. Pour B. Gerde, ces ateliers sont des temps forts de la réussite et du raccrochage, qui montrent aux jeunes qu’apprendre excède le champ purement scolaire. Il s’agit aussi d’aller à l’encontre de l’ennui, de stimuler la curiosité des adolescents et de lutter contre la passivité…
« Te sens-tu élève ici ? » : Marie-Cécile Bloch, enseignante en sciences de la vie, fait s’interroger Baptiste. Considérés comme « des individus autonomes et réflexifs », les jeunes sont amenés à s’autoévaluer, à donner sens par eux-mêmes à leur présence en classe. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la philosophie est enseignée dès la seconde. Les adolescents sont enclins également à faire part de leurs attentes, de leurs déceptions devant tel ou tel enseignement. En clair, si les professeurs évaluent les élèves, ceux-là ont aussi leur mot à dire. Quant aux enseignants, également volontaires, ils travaillent en équipe dans le souci de mieux se coordonner.
Toutes les catégories sociales sont représentées au Clept de Grenoble qui affiche une réussite de plus de 80 % d’élèves au baccalauréat, dans les mêmes sections que celles des lycées généraux (S, L, ES).
A CONSULTER
• Site Collège et lycée élitaire pour tous www.clept.org/jeunes/index.phpDes maîtresses efficaces. Faire réussir les élèves en difficulté
Une enquête récente a identifié précisément à partir d’un travail statistique cinq maîtresses « très efficaces » pour les élèves les plus en difficulté en CP et cinq qui l’étaient moins. Les différences entre elles paraissent à première vue minimes. Toutes déclarent vouloir faire réussir les élèves en difficulté et mettre en œuvre à leur intention des pratiques spécifiques. Où se jouent alors les écarts observés sur la progression des élèves ?
En fait, l’ensemble de ces enseignantes consacrent un temps significatif à s’occuper individuellement des élèves en difficulté. Mais pas pour faire exactement la même chose. Les plus efficaces centrent leur intervention sur le guidage de leur travail : répétition individualisée des consignes, aide matérielle (gomme, ciseaux, taille-crayon), accompagnement dans les tâches à accomplir. À l’inverse, les secondes aident moins directement et cherchent plus à faire comprendre aux élèves ce qu’ils ont à faire. Les maîtresses efficaces aident les élèves en difficulté à accomplir les mêmes tâches que les autres, alors que les enseignantes moins efficaces finissent souvent par leur donner des tâches plus simples. Lorsqu’elles organisent un travail de groupes, les premières ne constituent pas, par exemple, ces groupes par niveau.
Les maîtresses efficaces se montrent aussi un peu plus attentives que les autres maîtresses à la gestion de l’espace et du temps : elles déplacent plus souvent les élèves faibles en fonction des tâches à accomplir (plus près du tableau, seul à une table) et relâchent la pression à la fin de chaque demi-journée en proposant des tâches moins exigeantes. En résumé, les maîtresses efficaces cherchent à maintenir l’intégration des élèves en difficulté dans la classe et à cibler leur aide personnalisée sur la réalisation des tâches d’apprentissage fondamentales.
A CONSULTER
• « Au quotidien, les pratiques enseignantes à l’égard des élèves en difficulté scolaire » Céline Piquée, Groupement Innovation Recherche, n° 80, IUFM-Bretagne, 2007Lycées autogérés. Un enseignement résolument alternatif
Au lycée expérimental de Saint-Nazaire, la journée commence pour beaucoup à la cafétéria tenue par des équipes d’élèves. Pas de sonneries, pas d’entrées en cours surveillées… Les élèves se rendent dans leurs ateliers à l’heure où débute l’activité (affichée sur les nombreux tableaux d’information, indispensables dans un fonctionnement d’autogestion), ou travaillent seuls, en petits groupes ou avec l’aide de leur enseignant tuteur. L’environnement est complètement réapproprié par les adolescents : murs décorés et colorés, musique omniprésente à la cafétéria et dans certaines salles… La créativité et l’humour s’affichent partout…
Les lycées autogérés sont le lieu par excellence de l’expression de la culture adolescente. Les activités pédagogiques y sont programmées par les élèves en concertation avec les enseignants. Elles laissent une large place aux projets personnels et aux travaux sous forme d’ateliers. La vie quotidienne de ces établissements n’échappe pas au principe de cogestion et de collégialité : les tâches ménagères et l’administration courante sont prises en charge par des groupes mixtes d’élèves et d’enseignants…
Si le taux de réussite au baccalauréat est loin de battre des records, c’est tout simplement que le projet de ces établissements alternatifs, qui ne pratiquent aucune sélection à l’entrée, vise davantage l’épanouissement et le projet des jeunes que la performance. Certains d’ailleurs y obtiennent leur diplôme alors même qu’ils n’avaient pas été jugés en capacité de poursuivre un enseignement général dans un établissement traditionnel.
C’est en 1981 qu’Alain Savary, ministre de l’Éducation, avait décidé l’ouverture de cinq lycées autogérés. Le projet pionnier de lycée expérimental, porté par Gabriel Cohn-Bendit, pouvait alors voir le jour à Saint-Nazaire. En 2008, Xavier Darcos vient de donner son feu vert pour que ces pédagogies « innovantes » soient appliquées dans cinq collèges « difficiles » : une autonomie pédagogique avec des méthodes plus vivantes comme la confection de journaux, de blogs, des classes découvertes…
La pédagogie des lycées autogérés serait-elle en train de sortir de la marginalité ?
A CONSULTER
• Site www.ecolesdifferentes.free.fr/art13a.htm• L’École, un monde à construire ! Le lycée expérimental de Saint-Nazaire Patrick Le Ray, DVD, ArtScenic Production/France 3-Ouest/Public Sénat/TV‑Rennes/Télé Nantes, 2007.
L'école en Finlande. Individualiser l'enseignement
Considérer l’école comme un lieu de vie, et non exclusivement comme un lieu de savoir, voilà ce qui participe peut-être de la réussite de l’école finlandaise, confirmée à chaque publication du palmarès international (Pisa). Brillants en lecture et en maths, les petits Finlandais montrent aussi de remarquables capacités d’apprentissage des langues. Comment fonctionnent les écoles finlandaises ? Tout d’abord, la compétition n’est pas promue. Pas de grandes coupures dans la scolarité (ni école élémentaire, ni primaire, ni collège), les cours sont obligatoires de 7 à 16 ans, point. Chaque enfant peut assimiler l’enseignement fondamental selon son appétit et son rythme : pas de redoublements (sauf cas exceptionnels). Les élèves d’un même âge avancent ensemble, quel que soit le niveau de chacun. Les enseignants ont fréquemment recours au travail en petits groupes. L’avantage de cette organisation en effectifs réduits ? Les enfants forts aident ceux qui le sont moins, laissant la possibilité au professeur de s’occuper individuellement de tous les élèves.
Si les classes finlandaises sont hétérogènes (les classes de niveau n’existent pas), les professeurs adoptent une pédagogie adaptée à chaque élève. Loin de mettre l’accent sur les résultats – on ne commence en général à noter les enfants qu’à partir de 12 ans –, ils s’efforcent de valoriser « l’inclusion ». Dès qu’un élève présente une faiblesse dans une matière, il bénéficie immédiatement d’un cours supplémentaire personnalisé et d’un programme individuel, mettant l’accent sur des objectifs raisonnables à atteindre dans la discipline. Ce soutien individuel est totalement gratuit, comme le sont les fournitures, la cantine scolaire ou les frais de déplacement pour les enfants qui habitent loin.
Le suivi personnel et l’attention portée au parcours de chacun des enfants sont facilités par le petit effectif des établissements (le nombre moyen d’élèves en Finlande est de 167 contre 512 en France) et des classes (20 élèves au maximum). Il faut aussi noter la présence d’assistants pour seconder le professeur. Les enseignants, quant à eux, bénéficient d’une formation majoritairement axée sur les questions pédagogiques. Au final, la Finlande enregistre peu de laissés-pour-compte dans son système scolaire, même parmi les élèves issus de milieux défavorisés.
A CONSULTER
• « National summary sheets on education systems in Europe and ongoing reforms » Étude publiée par Eurydice, 2006