Le cinéma au 20e siècle

Le cinéma au 20e siècle. Entre loi du marché et règles de l’art, Julien Duval, CNRS, 2016, 280 p., 24 €.

Quoi de commun entre la saga Harry Potter et un film de Jean-Luc Godard ? Apparemment pas grand-chose, si ce n’est qu’ils appartiennent tous deux à la « grande famille » du cinéma, au sein de laquelle chaque membre revendique une vision propre de ce que doit être le septième art : art ou industrie ? Julien Duval, directeur de recherche au CNRS, s’empare de cette alternative récurrente pour brosser une histoire du cinéma, de ses débuts à nos jours. Son analyse, clairement bourdieusienne, lui permet d’apporter quelques nuances à cette polarité. Le cinéma, à ses débuts, fut considéré comme « un passe-temps d’illettrés », sans aucune qualité artistique. Mais lorsqu’à la fin des années 1920, en Europe, les pouvoirs publics se mêlent de protéger l’industrie cinématographique nationale en limitant les importations et en promouvant la « qualité », on voit poindre la structure bipolaire du cinéma commercial versus les films d’auteur. Elle se développe aussi au niveau international, entre le Vieux Continent et les États-Unis, qui tendent à exercer une hégémonie commerciale sur les marchés européens à compter de la Première Guerre mondiale. Les grands studios états-uniens incarnent l’équivalent de l’US Steel dans la métallurgie : pour eux, le cinéma est un commerce pur et simple, destiné à faire des profits. Les pays européens optent alors pour des productions de diffusion plus restreinte, plus élitiste. Mais ces deux genres ne s’excluent pas toujours aussi nettement. Lors de la période du Nouvel Hollywood, dans les années 1960, le cinéma états-unien s’ouvre aux écoles européennes.