La ségrégation résidentielle, c’est-à-dire le fait que les individus vivent au contact de voisins de même profil social, est un phénomène de plus en plus étudié. Se retrouve-t-elle également sur le lieu de travail ? Une équipe de chercheurs et chercheuses emmenée par le sociologue français Olivier Godechot, connu pour ses travaux sur les hauts revenus de la finance, a épluché les niveaux de salaire et les adresses professionnelles des salariés dans neuf pays d’Europe occidentale et centrale, au Canada, au Japon et en Corée du Sud. Dans la plupart de ces pays, les hauts salaires sont de moins en moins en contact avec les plus bas salaires. En France, par exemple, un salarié appartenant au 1 % de salaires les plus élevés du pays (soit plus de 10 000 euros nets par mois aujourd’hui) côtoyait parmi ses collègues 9 % d’individus appartenant à la même tranche en 1994 ; en 2019, ce chiffre est passé à 16 %. Dans le même temps, le pourcentage de ses collègues appartenant aux 75 % de salariés les moins bien payés est passé de 44 % à 24 %. On observe une tendance comparable quand on s’intéresse au « top 10 % » des salariés.