Les singes pensent-ils à ce qui les rend tristes ou heureux ? Se demandent-ils, quand ils se reposent, à ce qu’ils pourraient faire le lendemain ? Pas tous, selon une étude de chercheurs du CNRS en association avec des laboratoires canadiens et américains. À l’aide de techniques d’IRM fonctionnelles, ces scientifiques ont comparé l’activité du cerveau de singes non humanoïdes (ouistitis, macaques et microcèbes murins) à celle d’humains. Ils se sont intéressés au « réseau du mode par défaut » qui s’active quand le corps et l’esprit sont au repos. Chez l’humain, ce stade implique de nombreuses interconnexions entre régions situées à l’avant du cerveau dont le cortex préfrontal médian, et le cortex cingulaire postérieur qui se situe plus au centre. Selon les chercheurs, ces interconnexions, qu’on ne retrouve pas chez les singes non humanoïdes, permettraient notamment de se dégager des distracteurs environnants pour se recentrer sur soi, faire de l’introspection et de la projection dans l’avenir. Cette organisation serait donc apparue plus tardivement dans l’évolution, ce qui pourrait expliquer les capacités cognitives moindres et l’absence de pensée abstraite chez les primates non humanoïdes. Chez les grands singes (gorilles, chimpanzés) cependant, les chercheurs supposent un fonctionnement cérébral proche de celui des humains.
- Clément Garin et al., « An evolutionary gap in primate default mode network organization », Cell Reports, vol. XXXIX, n° 2, 12 avril 2022.