La mondialisation ? Le mot est apparu en 1990, quand on a pris conscience que l’histoire entrait dans une nouvelle phase – ultime ? – : celle de l’unification de la planète. La chute du mur de Berlin (1989) avait précipité l’effondrement de l’Union soviétique. Ç’en était fini des deux « blocs » qui s’affrontaient depuis un demi-siècle sur la scène mondiale. Un nouvel ordre international allait se mettre en place, a priori sous la houlette des États-Unis, qui apparaissaient alors comme la superpuissance mondiale. La fin de l’URSS marquait aussi le passage d’un continent à l’économie de marché. Au même moment, la Chine s’engageait aussi dans une curieuse mue, pas vraiment imaginée par Marx : le passage du communisme au capitalisme (sous la houlette du Parti !).
Accompagnant un processus d’unification économique et politique, une autre révolution était en cours : celle de l’information. 1990 est l’année de création du Web. L’Internet qui n’était jusque-là qu’un système de messagerie allait connaître en quelques années un fulgurant essor. Les ordinateurs connectés formaient un nouveau continent, numérique et virtuel, le « cyberespace » comme on disait alors.
Économique, géopolitique, culturelle, l’unification de la planète était en marche, une marche qui semblait irréversible, pour le pire ou le meilleur.
Or voici que depuis quelque temps, l’histoire semble faire marche arrière. L’idée de « fin de la mondialisation », voire de « démondialisation », fait les titres de la presse. Les indices sont évidents. La montée de l’islamisme n’est-elle pas une réaction globale contre une occidentalisation à marche forcée ? Partout, les peuples se révèlent tentés par des votes populistes et nationalistes : en Europe, mais aussi aux États-Unis ou en Inde. En 2016, il y eut les premiers coups de semonce : Brexit des Anglais, échec des accords Tafta (accord commercial entre les États-Unis et l’Europe) puis élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Parmi ses mesures phare, D. Trump promettait de construire un mur entre le Mexique et les États-Unis. Un mur, il s’en est reconstruit au même moment en Hongrie, contre l’afflux des migrants. Ce sont là des symboles qui ne trompent pas : la mondialisation s’était annoncée en 1989 par la chute d’un mur, celui de Berlin ; une nouvelle époque semble s’ouvrir aujourd’hui par la volonté d’en reconstruire !
L’histoire est-elle en train de faire marche arrière ? Un grand mouvement d’involution, prenant à contre-pied un processus séculaire est-il en cours ? Pour mesurer l’ampleur de ces phénomènes, sans se laisser aveugler par quelques clignotants, il est utile de regarder une à une les grandes lignes de force qui agissent sur l’évolution de la planète depuis un quart de siècle.
1 - Géopolitique :
de la gouvernance mondiale au monde multipolaire
Lorsque l’on aborde les questions de géopolitique, deux forces contraires sont toujours à prendre en compte : les logiques d’intégration et celles de fractionnement.