Peut-on soigner l'autisme ?

Grande cause nationale de l’année 2012, l’autisme, 
ses causes et sa prise en charge n’en finissent pas de déchaîner les passions. 
Est-ce une maladie ou un handicap ? Peut-on en guérir ? 
Que revendiquent les associations de parents ?

C’est un jeune homme à peine sorti de l’adolescence, comme on en voit des milliers dans les rues et les cafés. Un jeune homme dont le regard vous fixe tandis que vous lisez sur l’affiche où se trouve son portrait « Ludovic, autiste et diplômé », puis que vous regardez à nouveau ce visage, puis cette phrase encore, abasourdi, un peu honteux aussi, peut-être, comme toutes ces fois où l’on se laisse piéger par nos préjugés. Si vous prenez les transports en commun ou lisez le journal, sans doute avez-vous déjà vu les visages de Ludovic, de Noam (en CM1) ou de Kathia (bibliothécaire) que l’association de parents Vaincre l’autisme a souhaité faire connaître, au moment où la polémique sur la prise en charge de l’autisme en France bat son plein.

>> Est-on autiste à cause de sa mère ?

Depuis plusieurs années, plusieurs associations de parents mènent une croisade contre la psychanalyse. Cette opposition a un point de départ : les théories de Bruno Bettelheim (1903-1990). Dans La Forteresse vide, publié en 1967, ce psychanalyste rapprochait l'autisme infantile d’états psychiques similaires à ceux traversés pendant son internement en camp de concentration. Selon cette théorie, un enfant est autiste parce qu’il a fait l’expérience d’une « mère frigidaire », à l’indifférence glaçante – la seule façon de s’en prémunir étant pour l’enfant de se couper du monde extérieur. Pour Bettelheim, si les enfants sont autistes, c’est à cause de leur mère.

Depuis les années 1990, il est établi pour toute la communauté scientifique internationale que l’autisme n’est pas une psychose mais un trouble neurodéveloppemental. Et avoir un trouble neurodéveloppemental peut entraîner des souffrances psychiques. Pour Marie-Dominique Amy, présidente de la Coordination internationale entre psychothérapeutes psychanalystes s’occupant de personnes avec autisme (Cippa), la psychanalyse « se doit d’être en continuelle jonction avec les approches cognitives et les stratégies éducatives. Elle se doit également d’être concernée au premier chef par les recherches génétiques et neurologiques. Elle se doit enfin d’être dans l’écoute permanente des parents et d’établir avec eux un constant partenariat. »

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Il n’en reste pas moins que certains psychanalystes continuent à faire fi des découvertes scientifiques des quinze dernières années et à affirmer que l’autisme est une psychose où la mauvaise mère serait la cause de tout. Et les témoignages de parents s’estimant, eux et leurs enfants, victimes de « la mainmise depuis quarante ans de la psychiatrie psychanalytique en France » se sont multipliés. Dans son documentaire Le Mur, la réalisatrice Sophie Robert a récemment présenté des psychanalystes affirmant que l’autisme d’un enfant pouvait s’expliquer par une « mère trop froide » ou « trop chaude » et un père inapte à y faire barrage. Les psychanalystes interviewés ont affirmé que leurs propos avaient été déformés. Mais le mal était fait. Le 8 mars, pour la première fois en France, la Haute Autorité de santé (HAS) déclarait « non consensuelles » les approches psychanalytiques et recommandait très explicitement l’usage de méthodes éducatives et comportementales avec les personnes autistes.