Selon Sigmund Freud, la psychanalyse permet l’investigation des processus mentaux d’une façon unique, facilite le traitement des désordres névrotiques et, surtout, forme « une série de conceptions psychologiques qui s’accroissent ensemble pour former progressivement une nouvelle discipline scientifique » 1. Cet objet particulier qu’est l’inconscient est aujourd’hui étudié par d’autres sciences : les neurosciences. Cependant, si les sciences cognitives étudient l’inconscient cognitif, celui-ci n’est pas l’équivalent de l’inconscient freudien, aussi nommé inconscient affectif. L’inconscient cognitif pourrait être appelé le « non-conscient », puisqu’il concerne les opérations mentales dont nous ne conservons pas le souvenir (lorsque nous conduisons une voiture ou nous servons d’un instrument, nous ne retenons pas toutes les décisions et procédures motrices que nous exécutons par exemple).
L’inconscient freudien est composé de contenus refoulés. Il s’agit à la fois de représentations, c’est-à-dire d’images mentales (plurisensorielles), mais aussi de pensées primitives comme les désirs, les conflits, représentés en général dans les rêves. Toutes ces productions se constituent chez le sujet dès sa naissance. Les plus lointains souvenirs ne sont sans doute pas stockés de la même manière que les autres, les réseaux neuronaux s’avérant encore insuffisamment fonctionnels à cet âge. L’hypothèse de l’inconscient affectif a été formulée par d’autres savants, bien avant Freud 2. Cependant c’est lui qui a trouvé ce dénominateur et l’a inscrit dans un schéma plus général de l’appareil psychique humain.
Statut thérapeutique de la psychanalyse
Qu’est-ce qu’une psychothérapie psychanalytique ? - Avant d’inventer le terme « psychanalyse », Freud parle de psychothérapie psychanalytique. Il distinguera par la suite psychanalyse et psychothérapie, mais en désignant sous ce dernier terme la suggestion, les conseils et la postéducation, que l’on pourrait traduire par formation continue des adultes. Le terme « psychothérapie » était apparu en 1872 chez l’aliéniste Daniel Hack Tuke au sujet du soin des malades mentaux qu’il pratiquait en Angleterre. Freud introduit le mot « psychanalyse » en 1896. Cependant à partir de 1905, il emploiera psychothérapie et psychanalyse indifféremment. C’est donc la psychanalyse qui est définie comme une psychothérapie particulière que l’on retrouve dans la définition de Jean Laplanche et Jean-Bertrand Pontalis 3 : « La psychanalyse est souvent opposée aux diverses formes de psychothérapies, ceci pour toute une série de raisons, notamment : la fonction majeure de l’interprétation du conflit inconscient, l’analyse du transfert tendant à la résolution de celui-ci. » Ils concluent par : « Sous le nom “psychothérapie analytique”, on entend une forme de psychothérapie qui s’appuie sur les principes théoriques et techniques de la psychanalyse, sans cependant réaliser les conditions d’une cure psychanalytique rigoureuse. »
Dans la psychothérapie analytique actuelle, le thérapeute s’abstient de répondre au symptôme ou au conflit par tout procédé tel que : suggestion, autorité, compassion, exhortation morale. En revanche, il met en place ce travail commun de copensée en mettant au service de l’activité psychique du patient, son propre fonctionnement. Certains ont pu parler de « réanimation psychique » comme Rosine Debray avec les malades somatiques, d’autres de « prêter » son appareil psychique au patient. L’analyse du transfert et du contre-transfert est primordiale dans la psychanalyse. Bien que Freud n’ait pas parlé du contre-transfert et ait conçu le transfert d’abord comme une résistance à l’analyse, ces deux types de transfert forment le levier de l’analyse. La réponse émotionnelle de l’analyste à son patient est un indice fort des processus inconscients qui s’y déroulent. Le cadre analytique est toujours fixe mais une demande de variation d’horaire ou de durée sera interprétée comme une transformation en acte, d’un aspect non verbalisé du transfert. Enfin, le travail sur les remémorations et sur les rêves peut être sollicité par l’analyste, en sachant que cela peut aussi servir de déplacement pour le patient qui se réfugie dans une prise de distance émotionnelle bien commode et une identification à l’analyste prématurée.