Comment se fabriquent des parents ? La culture de la parentalité est, au sens des psychanalystes, des psychologues, des psychiatres mais aussi des philosophes, des enseignants, des éducateurs, des politiques, le défi du 21e siècle. C’est pourtant le plus vieux métier du monde, le plus universel, le plus complexe sans doute, peut-être même le plus impossible mais aussi, le plus multiple. L’important, c’est de trouver sa propre manière d’être parent, de transmettre le lien, la tendresse, la protection de soi et des autres, la vie. La parentalité, mot étrange, que nous avons forgé dans différentes langues ces dernières années à partir du mot anglais parenthood, nous en avons fait un néologisme en français comme si nous avions pris conscience, récemment, que la parentalité était un processus complexe et pas un état, et qu’il fallait un nouveau mot pour dire cela.
Les ingrédients de la parentalité en transculturel
Ainsi donc, on ne naît pas parents, on le devient dans un contexte donné… La parentalité se fabrique avec des ingrédients multiples. Certains sont collectifs, ils appartiennent à la société tout entière, changent avec le temps, ceux-là sont historiques, juridiques, sociaux et culturels. D’autres sont plus intimes, privés, conscients ou inconscients, ils appartiennent à chacun des deux parents en tant que personne et en tant que futur parent, au couple, à la propre histoire familiale du père et de la mère, à la structuration de la famille. Ici se joue ce qui est transmis et ce que l’on cache, les traumas infantiles et la manière dont chacun les a colmatés. Enfin, il est une autre série de facteurs qui relèvent de l’enfant lui-même, qui transforme ses géniteurs en parents. Le bébé, on le sait depuis les travaux de Cramer, Lebovici, Stern et bien d’autres, est un partenaire actif de l’interaction parents-enfant et par-là même de la construction de la parentalité.
Or, nos sociétés multiculturelles nous enseignent une chose : il y a mille et une façons d’être père et d’être mère. Pour les professionnels de l’enfance – éducateurs, psychologues, personnels soignants… –, toute la difficulté réside dans le fait de laisser de la place pour qu’émergent ces potentialités, sans émettre de jugement sur « la meilleure façon d’être père ou d’être mère ». C’est un travail ardu, car la tendance naturelle de tout professionnel est de penser qu’il sait mieux que les parents comment être avec l’enfant, quels sont ses besoins, ses attentes… Or, il vaudrait mieux permettre que les capacités émergent chez les parents, et se mettre en disposition de soutenir ces capacités.