Un livre à plusieurs voix : L'Interprétation du rêve

Clef de voûte de la psychanalyse, cet ouvrage décisif fut 
remanié plusieurs fois par Freud pour affiner ses thèses et contrer ses rivaux. 
Quitte à beaucoup s’éloigner de la première version.

L’Interprétation du rêve (1899-1900) est le premier grand œuvre théorique de Sigmund Freud. Il est aussi généralement considéré comme le texte fondateur de la psychanalyse. L’auteur s’y présente comme un innovateur osant, enfin, introduire le rêve dans les sciences. En réalité, au moment de la première publication en 1899, il existe déjà toute une culture savante d’auto-observation qui prend le rêve comme objet de savoir. Plusieurs savants francophones ont fait école dans ce domaine : Alfred Maury (1817-1892), notamment, avec Le Sommeil et les Rêves (1861). Cela étant, cette psychologie du rêve du XIXe siècle ne se situe pas dans le champ médical et n’a, en principe, pas de visée thérapeutique. Le « coup » de Freud est ainsi tout d’abord de mener l’auto-observation sur un terrain clinique : il traite le rêve comme un symptôme et fait de son analyse une nouvelle technique pour soigner les névroses. De plus, il maintient que celui qui rapporte son rêve a besoin de quelqu’un pour l’écouter ou pour le lire. Contrairement à l’auto-observation des psychologues qui visait à produire des données abstraites, les rêves de l’autoanalyse freudienne s’adressent toujours à un autre et restent marqués par ce « rapport ». Les germes de ce jeu d’écriture et d’interprétation se trouvent dans la correspondance de Freud avec son ami Wilhelm Fliess (1858-1928), oto-rhino-laryngologiste à Berlin, qui reçoit et critique les récits de rêves freudiens, devenant ainsi le premier lecteur du livre naissant.

 

Zurich, de l’enthousiasme à la querelle