L’histoire de la démocratie, en Europe, n’a rien d’un « long fleuve tranquille ». Deux « crises de croissance » ont émaillé son parcours, selon Marcel Gauchet. La première intervient autour de 1900 avec l’irruption des masses en politique. On assiste alors à la victoire de la démocratie représentative à travers le suffrage universel. Le problème, c’est que les gouvernants ne parviennent pas à trouver les moyens politiques et institutionnels d’assimiler cette énorme transformation. L’impuissance des parlements, déchirés par les querelles politiciennes mais incapables de décider de l’avenir collectif, est dénoncée. Quant à la société, elle est travaillée par les antagonismes de classe, fustigés par les théoriciens socialistes. Dans ce contexte, les totalitarismes prétendent établir un régime définitif et restaurer l’ordre face à des démocraties qui semblent incapables de maîtriser leur destin.