Vivre l'utopie au 19e siècle

Tout au long du 19e siècle, des hommes, des femmes et des collectifs conçoivent et expérimentent des formes de sociétés alternatives, souvent influencées par les idées socialistes.

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Au début de la monarchie de Juillet (1832), Désirée Véret fonde le journal La Femme libre alors qu’elle est âgée d’un peu plus de 20 ans. Huit ans plus tard, elle met en place près de Paris un Institut pour l’enfance – mariée, elle s’appelle désormais Désirée Gay. Elle participe activement au mouvement associationniste en 1849 avec l’Association des travailleurs de toutes les professions et de tous les pays tandis que le gouvernement de la Deuxième République (1848-1851) tourne le dos aux questions sociales. Elle œuvre à la fin des années 1860 pour la promotion des femmes à l’Association internationale des travailleurs, y présidant une éphémère Section des dames de la Première Internationale.

Le parcours de Désirée Véret

Au cours de sa longue existence (1810-1891), Désirée Véret écrit dans la presse, elle signe Éducation rationnelle de la première enfance. Manuel à l’usage des jeunes mères (1868), elle alimente par ses idées les écrits de son mari Jules. Elle s’engage aussi au quotidien, comme en témoigne sa correspondance avec des figures marquantes du premier socialisme – le penseur Charles Fourier et son principal disciple Victor Considerant, le chef de l’Église saint-simonienne Prosper Enfantin, d’autres encore. Sa réflexion sur le monde et la société, elle la construit en circulant d’une pensée à une autre : le saint-simonisme*, le fouriérisme*, le communisme owénien*, l’associationnisme*, l’internationalisme*.

Saint-simonisme : doctrine et mouvement qui rassemblent au 19e siècle, essentiellement en France, des personnes adeptes de la pensée de Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon (1760-1825). Le saint-simonisme compte un nombre notable de femmes de diverses conditions dans ses rangs au début des années 1830.

Fouriérisme : doctrine et mouvement qui rassemblent au 19e siècle, en France et ailleurs (Brésil, États-Unis, pays roumains…), des personnes adeptes de la pensée de Charles Fourier (1772-1837). Le fouriérisme se structure notamment avec l’École sociétaire, autour de Victor Considerant.

Communisme owénien : doctrine et mouvement qui rassemblent au 19e siècle des personnes adeptes de la pensée de l’entrepreneur britannique Robert Owen (1771-1858). Parmi leurs objectifs majeurs : la communauté, ou bien encore la coopérative.

Associationnisme : doctrine économique et sociale adoptée par une partie du mouvement ouvrier et social au 19e siècle, selon laquelle la solution aux maux et injustices en société réside dans le modèle de l’association libre et volontaire.

Internationalisme : doctrine favorable à l’alliance internationale des classes populaires et au développement de la solidarité entre les peuples, afin de lutter contre le capitalisme et le nationalisme. Se structure au 19e siècle, avec en particulier l’AIT (Première Internationale) en 1864.

On dirait qu’elle ne baisse pour ainsi dire jamais pavillon. Installée au crépuscule de sa vie à Bruxelles, veuve, isolée et devenue presque aveugle, elle invite encore en septembre 1890 son vieux compagnon V. Considerant à fonder un petit journal « utopiste scientifique » et même une « École utopique scientifique et sociale ». Elle parcourt le 19e siècle en traversant les frontières, qu’elles soient sociales ou géographiques. Ouvrière de l’aiguille, elle côtoie des milieux fort divers de femmes et d’hommes, bourgeois ou prolétaires. Française, elle gagne au milieu des années 1830 sa vie à Londres – c’est là qu’elle se rapproche de la pensée de Robert Owen et découvre le coopérativisme* britannique.