Grâce aux progrès de la médecine, un nombre croissant de patients est éligible à la transplantation d’un rein. Malheureusement, l’offre d’organes ne suit pas. Le nombre de cadavres en état de mort cérébrale n’augmente pas aussi vite qu’il le faudrait. Les familles ajoutent leur grain de sel en n’autorisant pas toujours le prélèvement des organes du défunt. Reste bien sûr la possibilité de recourir à un donneur vivant, issu du cercle familial, mais les patients n’ont pas tous la chance de pouvoir compter sur un proche généreux – et compatible. Aux États-Unis, alors que 13 700 transplantations de rein ont été pratiquées en 2005, 65 000 personnes attendaient toujours leur tour au début de l’année 2006 (1). On estime à 3 500 le nombre de patients américains qui meurent chaque année faute d’avoir reçu un rein à temps.
Certains économistes se sont penchés sur ce problème épineux, dont un prix Nobel aussi célèbre que controversé, Gary Becker. Pour cette figure éminente de l’école de Chicago, il n’est pas de déséquilibre entre une offre et une demande qui ne puisse être résorbé pour peu que l’on y mette le prix. C’est donc avec un imperturbable aplomb qu’il propose de payer les donneurs d’organes. Pour peu que la rémunération compense adéquatement les risques (y passer ou y laisser des plumes) et les coûts (les revenus perdus pendant la convalescence), elle suffira toujours à convaincre un nombre suffisant de donneurs. Selon G. Becker et Julio Jorge Elías, qui évaluent le prix d’un rein à 15 200 dollars, une telle compensation financière augmenterait pratiquement de moitié le nombre de transplantations (2).