Le sujet du livre de Pierre-Henri Castel peut sembler a priori secondaire. Or il est fondamental. Il s’agit de retracer l’évolution psychologique, historique et culturelle de la contrainte intérieure. Autrement nommée en termes modernes « obsession », ou « compulsion », elle est présente depuis bien longtemps chez le sujet. Cette contrainte interne à l’action est un mouvement de retournement de la conscience sur elle-même, sa face sombre, et, selon P.‑H. Castel, la compagne indéfectible de l’individualisme s’affirmant de l’Antiquité à aujourd’hui. Elle est l’inquiétude de mal faire qui accompagne toujours l’action : remords, regret, envie de revenir à l’état d’avant l’action… Résumant d’une phrase son projet, P.‑H Castel écrit : « C’est un questionnement sur la fabrication même de l’intériorité, et de la forme qu’elle a imposée au soi en Occident, dans et par l’autocontrainte psychique. » Évoluant avec le temps, l’approfondissement de la conscience découlant de la contrainte intérieure a produit des souffrances spécifiques, « lesquelles appellent des consolations, des soins, et enfin des thérapies aussi spécifiques, puis tout un ensemble d’institutions et de techniques de l’âme puis de l’esprit, et finalement aujourd’hui du cerveau ».
Âmes scrupuleuses, vies d'angoisse, tristes obsédés
Âmes scrupuleuses, vies d’angoisse, tristes obsédés. Obsessions et contrainte intérieure de l’Antiquité à Freud . Pierre-Henri Castel Ithaque, 2011, 456 p. 34 €