Comment apprendre en groupe ?

Les élèves peuvent-ils apprendre ensemble, tout en devenant autonomes et responsables ? C’est ce que visent les pédagogies coopératives qui nécessitent maîtrise et organisation rigoureuse de la part des enseignants.

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Déjà anciennes, les méthodes coopératives sont issues notamment des travaux de pédagogues français comme Célestin et Élise Freinet, Émile Bugnon, Barthélemy Profit, Fernand Oury… Mais leur place dans le système éducatif demeure toujours très minoritaire. Aux yeux de leurs opposants, elles négligeraient l’instruction, mineraient l’autorité du maître, et réduiraient peu les écarts de performance entre élèves. Sur la rive opposée, leurs partisans, eux, y voient un moyen d’autonomiser, de responsabiliser et d’éduquer les enfants à la citoyenneté. L’économiste Yann Algan fait le constat, en France, d’une grande défiance de la population vis-à-vis des institutions et d’une incapacité à coopérer. Principale responsable selon lui : la politique éducative. Il préconise donc d’introduire les méthodes coopératives dès le plus jeune âge. Comme modèle à suivre, il cite les États scandinaves qui ont investi massivement dans les pédagogies coopératives. Seul 15 % du temps y serait consacré à recopier ce qui est écrit au tableau, contre 60 % en France… « Les pays nordiques ont beaucoup réfléchi au contenu pédagogique et à une véritable dissociation entre la maternelle et l’élémentaire, précise l’économiste. Ils ont des diplômes spécifiques de pédagogue pour enseigner au primaire. Ce n’est pas du tout le cas en France : la maternelle est conçue uniquement comme un temps de préparation à l’école élémentaire, plutôt que comme un temps pour développer des pédagogies de travail en groupe 1. »

Ne pas laisser un élève seul face au blocage

Concrètement, comment s’amorce la coopération à l’école ? C’est d’abord la rencontre entre un élève en demande et un autre qui lui offre un peu de son temps. Cette entraide peut se traduire par du tutorat ou du travail en équipe. Le principe est de ne pas laisser un élève seul face à un blocage cognitif, et de transformer la classe en réseau d’échange de savoirs. Cependant, l’élève reconnu comme compétent n’est pas là pour dévoiler la solution, mais expliquer, fournir des exemples… « S’il livre des indices trop avancés, l’élève tutoré est privé de l’activité cognitive et ne peut plus apprendre », indique Sylvain Connac, maître de conférences en sciences de l’éducation à l’université Montpellier-III 2. Étonnamment, cette entraide profite encore davantage au tuteur : le fait de restituer ses connaissances, en les reformulant, contribuerait à les renforcer.