Culture de masse : les grandes approches
LA VEINE CRITIQUE
Theodor W. Adorno (1903-1969), philosophe et musicologue, est marqué par l'usage des médias dans la propagande totalitaire. Dans La Dialectique de la raison (avec Max Horkheimer, 1944), il décrit la culture de masse comme un système de domination idéologique. Elle contribue à la dissolution du sens critique en diffusant des messages séduisants : ils soulagent, font rêver, endorment la conscience et masquent la vérité de l'exploitation capitaliste. L'homme moderne, isolé et aliéné, est ainsi maintenu dans sa passivité.
Christopher Lasch (1932-1994), historien américain, conteste, dans Culture de masse ou culture populaire ? (Mass Culture Reconsidered, 1981), l'idée selon laquelle la culture de masse serait démocratique : la liberté humaine ne se réduit pas à celle du consommateur. Sapant les fondements de la culture populaire et ses capacités de résistance, la culture de masse engendre la passivité intellectuelle, la confusion et l'amnésie collective, en rendant toutes les idées « également oubliables et dépourvues de signification ».
Pierre Bourdieu (1930-2002) condamne théoriquement la culture de masse. Dans La Distinction, critique sociale du jugement (1979), il propose une théorie des cultures de classe dans laquelle les classes populaires, exclues du monde de la « haute culture », doivent se contenter de produits standardisés, et donc sans aucune valeur. Ce qui induit un rapport « par défaut » à la culture, rapport marqué par la honte de ne pouvoir accéder à la culture légitime qui reste l'étalon auquel est rapportée toute pratique culturelle.