Égypte, le plus long empire de l'histoire

L’Empire égyptien a duré trois millénaires. Même s’il connut des périodes de dislocation et d’occupation étrangère, cet État pionnier a fait preuve d’une stabilité sans égale dans l’histoire.

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Insérée entre deux déserts, au nord-est du continent africain, la basse vallée du Nil est devenue, au prix d’un travail intense de ses habitants, un État prospère, à l’économie essentiellement fondée sur la céréaliculture. Elle n’a pourtant jamais été isolée de ses voisins et a entretenu, dès l’origine, des contacts étroits avec la Nubie au sud, et le Proche-Orient au nord-est. L’État égyptien a ainsi été l’un des principaux acteurs économiques et politiques en Méditerranée orientale et en mer Rouge durant toute l’Antiquité.

Le Nil constitue l’élément structurant majeur de la géographie égyptienne. Les groupes humains, composés de chasseurs-pêcheurs-cueilleurs, se sont progressivement rassemblés autour du fleuve lorsque le climat s’est asséché, puis ont adopté l’agriculture et l’élevage comme modes de subsistance à partir du 6e millénaire avant notre ère.

Au rythme des crues

Le régime du Nil est caractérisé par sa crue annuelle : les eaux du fleuve inondent la majorité des terres cultivables entre mi-juillet et octobre. Ce phénomène rythmait fortement – jusqu’à la construction du Haut Barrage d’Assouan dans les années 1960 – l’année égyptienne, tant pour l’agriculture que pour les transports. En effet, les conditions de navigation sur le fleuve, voie majeure de communication, varient considérablement d’une saison à l’autre. La meilleure saison pour le transport de charges lourdes est ainsi celle de l’inondation, en raison de la hauteur du fleuve et de vents favorables. Au contraire, durant les quelques mois qui précèdent la crue, seules les embarcations les plus légères naviguent avec facilité. Selon la saison et la charge, on estime qu’il fallait entre 19 jours et un mois pour naviguer à contre-courant depuis Memphis, la capitale (au sud du Caire actuel), jusqu’à la frontière sud, à Assouan. Cela permet d’imaginer à quelle vitesse les hommes, les marchandises, mais surtout les informations et les ordres pouvaient circuler.

La crue du fleuve joue aussi un rôle majeur dans le cycle agricole, puisque l’agriculture égyptienne est majoritairement une agriculture de décrue. Contrairement à ce qui a longtemps été affirmé, il n’y eut pas durant l’Antiquité de grands travaux d’irrigation gérés par l’État central. On a plutôt affaire à une gestion locale ou régionale des eaux de la crue grâce à des digues et des canaux de petite envergure, qui exploitent la morphologie du terrain.

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Mais comment naît justement cet État égyptien, l’un des premiers grands États territoriaux de l’histoire ? Entre 4500 et 3200 avant notre ère, les communautés humaines qui peuplent les bords du Nil adoptent une organisation sociale de plus en plus hiérarchisée. Puis on observe une progressive uniformisation culturelle vers 3500-3400 avant notre ère, elle-même suivie d’une unification politique. Les rois de la ville de This-Abydos semblent s’imposer à ceux de Nagada et Hiérakonpolis au sud, puis ils étendent leur pouvoir jusqu’au delta. Vers 3100 environ avant notre ère, une monarchie unifiée règne donc sur l’ensemble de l’Égypte. Cette royauté sacrée s’affirme d’emblée à travers une série de représentations, dont certaines perdurent pendant toute l’Antiquité. Ainsi de la figuration du roi guerrier, dont le canon est fixé sous le règne de Narmer, premier souverain de la Ire dynastie, sur une grande palette cérémonielle. Cette image du roi, s’apprêtant à frapper un ennemi à l’aide d’une massue, est répétée à l’envi jusqu’à l’époque romaine, trois millénaires plus tard.