Retraçant son itinéraire personnel de jeune immigré espagnol, puis celui, professionnel, de psychologue clinicien impliqué dans le social, Josep Rafanelli i Orra dresse un état des lieux très critique du travail social en France aujourd’hui. Citant une étude épidémiologique de 2004, l’auteur rappelle que, parmi la population carcérale, huit hommes sur dix et plus de sept femmes sur dix souffrent de troubles psychiatriques. Dépression, anxiété généralisée, schizophrénie, paranoïa, psychoses hallucinatoires chroniques, autant de pathologies qui ne sont pas traitées, mais simplement maîtrisées à l’aide de psychotropes. On assiste donc à une médicalisation croissante de la prison, mais sans que les détenus soient vraiment soignés ni préparés à une réinsertion. Le travail du psychologue, confronté à une logique standard qui s’insinue jusque dans le traitement de la souffrance des exclus, en vient à perdre sa raison d’être essentielle. La peur républicaine du communautarisme conduit à instaurer un protocole unique dans lequel doivent entrer toutes les pathologies et toutes les personnes, quelle que soit leur origine. Or les parcours des individus, leurs héritages culturels, leurs capacités sont, selon l’auteur, essentiels pour comprendre leurs troubles.
En finir avec le capitalisme thérapeutique
En finir avec le capitalisme thérapeutique. Soin, politique et communauté. Josep Rafanell i Orra, Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2011, 350 p., 17,50 €.