Ève a bien existé. Elle aurait même vécu en Afrique il y a 200 000 ans environ. C’est la doyenne d’Homo sapiens et la grand-mère de toute l’humanité actuelle.
Voilà l’hypothèse annoncée par le biologiste Allan Wilson en 1987. Le chercheur était parvenu à cette conclusion en étudiant de l’ADN mitochondrial des populations actuelles. L’ADN mitochondrial (ADNm) ? Chacun sait que l’ADN contient le « code génétique », censé contenir l’information clé de la vie. Ce que l’on sait moins, c’est que nous possédons tous un « autre ADN », qui appartient aux mitochondries : des petits organismes situés dans chaque cellule et lui servant de batterie énergétique. L’ADN des mitochondries se transmet de mère à fille d’une génération à l’autre, uniquement par la lignée maternelle. En étudiant les mutations successives de cet ADNm, A. Wilson est parvenu à calculer que l’espèce humaine remonte à une première communauté d’Homo sapiens ayant vécu en Afrique il y a environ 200 000 ans. Pour donner écho à cette découverte, il a baptisé « Ève » l’ancêtre commune de tous les Sapiens actuels. Un très bon coup de communication scientifique : l’hypothèse de « l’Ève africaine » a alors confirmé ce que les paléontologues avaient supposé à partir d’archives fossiles.
De Ève à Gaïa…
Par quelle bizarrerie de la nature les mitochondries possèdent un ADN propre, différent de celui du noyau ? Pour répondre à cette question, une jeune biologiste de 29 ans avait imaginé en 1967 une hypothèse alors iconoclaste : les cellules complexes, dotées d’un noyau et de mitochondries, seraient nées d’une sorte de fusion entre des cellules anciennes. Certaines grosses cellules auraient absorbé des bactéries et les auraient intégrées dans leur organisme. Voilà pourquoi les mitochondries, anciennes bactéries indépendantes capturées, possèdent leur propre ADN. Lynn Margulis suggérait une hypothèse totalement iconoclaste. Cette curieuse théorie « symbiotique » allait à l’encontre de tout ce que l’on croyait savoir sur l’évolution. Selon la théorie darwinienne, l’origine des espèces provient de mutations progressives d’une espèce, pas de la fusion entre espèces étrangères ! Mais la jeune femme persiste et signe, contre la caste dominante des mandarins.