L'humanité peut-elle égaler Dieu ?

Rendre l’humanité immortelle et la lancer à la conquête des étoiles : tel est le rêve du cosmisme, une idéologie antérieure au transhumanisme… et tellement plus ambitieuse !

16578682620_TWI.webp

Si la conquête de l’espace était passée de mode depuis la fin des années 1970, l’idée reprend du service. Des milliardaires se lancent des concours de testostérones à qui s’envolera le premier. La Chine, Israël, l’Inde relancent la course à la Lune. Sur le plan scientifique, on s’interroge de plus en plus sur la vie extraterrestre… Tout laisse à penser que l’espace sera au centre des préoccupations du prochain siècle.

Au-delà de l’actualité, il existe depuis plus d’un siècle un courant de pensée qui affirme que le destin de l’être humain est dans les étoiles. Une idée synthétisée par le père des fusées soviétiques, Konstantin Tsiolkovsky (1857-1935) : « La Terre est le berceau de l’humanité, mais on ne reste pas éternellement dans un berceau. »

Lors de cette ultime migration, nous serions appelés à devenir une autre espèce. C’est pourquoi le sujet de la colonisation spatiale est très proche du transhumanisme, l’idée que la technologie va nous permettre de dépasser nos limites physiques et intellectuelles, en premier lieu notre durée de vie bien trop courte. Mais ce courant d’idées va plus loin que le simple transhumanisme : il l’intègre dans une perspective globale, s’interroge sur la place de notre espèce dans l’Univers.

Comment nommer une telle philosophie ? Elle ne possède pas de nom précis. Le plus simple est de la baptiser comme l’idéologie qui fut l’une de ses premières incarnations : cosmisme. Le cosmisme est né en Russie à la fin du 19e siècle, sous la plume de Nikolaï Fiodorov (1829-1903), qui considérait que l’humanité devait se vouer désormais à la « tâche commune » : acquérir l’immortalité et ressusciter les morts. La philosophie de N. Fiodorov était un mélange de science et de mysticisme. Pour lui, ressusciter l’ensemble de nos ancêtres pouvait s’effectuer à partir des traces qu’ils ont laissées dans le monde, ce qu’il appelait la « poussière ancestrale ».

publicité

Cela fait de N. Fiodorov, plus qu’un adepte de la conquête spatiale, un des premiers immortalistes et transhumanistes. La conquête des autres planètes était une nécessité dans son plan, tout d’abord pour retrouver la poussière ancestrale qui aurait pu s’enfuir dans le cosmos, mais aussi, bien sûr, pour loger toutes ces personnes ressuscitées. Parmi ses disciples, on trouvera le scientifique K. Tsiolkovsky, mais aussi Vladimir Vernadsky (1863-1945) qui élabora les concepts de biosphère et de noosphère, la « conscience planétaire », un terme popularisé par le père Teilhard de Chardin (1881-1955), qui assista aux conférences de V. Vernadsky à la Sorbonne…