« Aucune question peut-être, dans toute l’organisation de notre enseignement, n’a suscité plus de controverses que le baccalauréat. Souvent modifié, il n’a jamais cessé d’être suspect à ceux qui s’occupent des problèmes d’éducation, ni de provoquer les plaintes des maîtres et des parents… », peut-on lire dans la Revue internationale de l’enseignement de… 1890.
Le constat n’a semble-t-il pas pris une ride !
En février dernier, la réforme annoncée par le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer pour 2021 n’a pas manqué de provoquer son lot de commentaires les plus inquiets. Devant la nécessité, reconnue par tous les experts de « dépoussiérer » l’examen et de « l’adapter à son temps », surgit inévitablement la crainte de voir disparaître ce qui est devenu une véritable institution républicaine, censée permettre l’accès au plus grand nombre aux études supérieures…
Cela n’a pourtant pas toujours été le cas. Le baccalauréat, apparu au Moyen Âge, a longtemps été un diplôme réservé à une élite lettrée, aristocratique puis bourgeoise, avant de devenir l’examen de base indispensable à toute formation, tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Moyen Âge : un diplôme universitaire « redoutable »
Une ébauche d’enseignement public se constitue entre 11e et 13e siècle, avec l’apparition des écoles diocésaines sous l’égide des évêques. Mais à une époque où le développement urbain nécessite de plus en plus de personnes sachant lire et écrire, le monde des intellectuels cherche à acquérir son autonomie face aux autorités civiles et religieuses. C’est ainsi que naissent les premières universités. Les désordres et les rixes avec la police provoqués par des maîtres et écoliers parisiens plus que turbulents conduisent Philippe Auguste à leur accorder, par une charte royale de 1200, un statut garantissant liberté et sécurité. L’université de Paris, avec ses facultés de théologie, droit, médecine et des arts peut alors attirer des étudiants de toute l’Europe. Les « escoliers » y restent six ans (entre 14 et 20 ans environ), à l’issue desquels ils passent un « baccalauréat ». Ceux qui veulent enseigner devront ensuite obtenir une licence, accordée après un examen oral redoutable, nous dit l’historien Georges Minois, appelé le baccalariandorum. Les cours sont oraux ; faute de papier, on écoute les maîtres et on les paye de cadeaux, en vue de l’obtention du diplôme !