Sciences Humaines : Le mouvement des sans-papiers a occupé l'actualité durant plusieurs mois. En fait, comme vous le rappelez dans votre livre, ce phénomène n'est ni nouveau, ni propre à la société française.
Johanna Siméant : En effet, dès 1972, des étrangers se manifestent pour obtenir la régularisation de leur situation. Ils poursuivent des grèves de la faim dans toute la France jusqu'à la mi-1973 contre les circulaires Marcellin et Fontanet. Fin 1972, à Valence, a lieu une grève de la messe de minuit. C'est durant ces années que le terme de sans-papiers apparaît. Des protestations plus isolées suivront tout au long de la décennie. Au début des années 80, des Turcs travaillant dans la confection clandestine du Sentier réclament leur régularisation. Rappelons enfin ce que l'on a appelé le mouvement des déboutés du droit d'asile : près de 1 500 demandeurs d'asile, auxquels la France n'a pas reconnu le statut de réfugié politique, vont mener en 1991-1992 un mouvement de grève de la faim dans plusieurs villes. En mai 1991, une manifestation réunit près de 10 000 personnes, dont beaucoup de sans-papiers, dans les rues de Paris.