Le citoyen romain et ses plaisirs

Le citoyen romain idéal ne s’accouple que pour se reproduire. Mais il se délasse en banquetant aux thermes entouré de jeunes éphèbes.

Les Romains, a priori, n’ont pas de sexualité. Déjà passablement contestée dans les années 2000, la notion même de « sexualité » ne peut certainement pas s’appliquer aux femmes et aux hommes d’il y a deux mille ans. Le terme n’existe d’ailleurs ni en latin ni en grec. Ce n’est pas une seule question de terminologie, c’est aussi une question de pratique. La compréhension des anciens Romains nécessite un redéploiement complet des fonctions par rapport aux pratiques d’aujourd’hui. Les Romains sont esclavagistes et polythéistes, ne mangent pas comme aujourd’hui, ne lisent pas comme aujourd’hui, n’ont pas la même mémoire que celle d’aujourd’hui, ne font pas la guerre comme aujourd’hui. En toute logique, ils ne connaissent pas la volupté comme aujourd’hui.

À Rome, il y a des hommes libres, qui sont des citoyens-soldats, ou bien des hommes esclaves, qui ne sont ni des citoyens ni des soldats. Et il y a des femmes libres, qui sont des épouses et des mères, ou bien des femmes esclaves, qui ne sont pas des épouses mais peuvent être des concubines, et qui ne sont pas des mères mais qui peuvent être des nourrices. Pour un citoyen-soldat, le plaisir n’est pas une notion constitutive de son identité, c’est même une notion étrangère, surtout grecque ou asiatique, car la Grèce asiatique est la contrée de la mollesse et de la volupté.

L’homme romain libre se lève tôt, il a dormi seul et n’a commis avec son épouse, femme libre, née de parents libres, que le seul acte du devoir conjugal. L’homme libre n’embrasse pas sa femme. C’est à peine s’il la touche. S’il avait un comportement trop pressant à l’égard de son épouse, la femme irait immédiatement s’en plaindre à son père, lequel serait indigné par la volupté de son gendre. On connaît ainsi des cas de divorce obtenus par une épouse au motif qu’un mari s’est montré trop vénérien.