Le politologue Nicolas Guilhot retrace dans The Democracy Makers (Les Faiseurs de démocratie) l’histoire des militants professionnels et des fonctionnaires publics qui, à partir de la guerre froide, ont œuvré depuis les États-Unis à la promotion de la démocratie. Liés aux néoconservateurs américains, agissant dans l’orbite de l’administration américaine, ils ont participé à l’avènement d’une conception purement institutionnelle de la démocratie. Pour N. Guilhot, « la promotion de la démocratie est devenue le langage technique de la gestion des périphéries globalisées ».
Qui sont les « democracy makers » ?
Les pratiques de « promotion de la démocratie » naissent dans le contexte de la diplomatie de la guerre froide et se dotent de structures institutionnelles spécifiques à partir des années 1980. On y retrouve des branches spécialisées du département d’État américain et des fondations privées, comme celles de George Soros. On y trouve aussi des organisations non gouvernementales ou paragouvernementales comme par exemple le National Endowment for Democracy. Ces réseaux se professionnalisent rapidement. Ils se dotent d’une publication, le Journal of Democracy, reçoivent le renfort de chercheurs en sciences sociales et développent des modèles théoriques adoptés par un large éventail d’acteurs et d’institutions. Soulignons cependant que le champ de la promotion de la démocratie s’est formé essentiellement dans le contexte des transitions démocratiques en Europe de l’Est. Aujourd’hui, le contexte est fondamentalement différent, à tel point qu’il y a lieu de se demander si la notion de « promotion de la démocratie » a encore un sens.
(1) D.C. Gompert et J. Gordon IV, « War by other means », Rand Corporation, 2008. (2) Collectif, « Conterinsurgency and constitutional design », , vol. CXXI, n° 6, avril 2008.