Le travail sous algorithme

Ubérisation, et après ? Pascal Savoldelli (dir.), Le Détour, 2021, 268 p., 19,90 €.

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L’entreprise Uber, qui a commencé à déployer ses activités en France au début de la décennie 2010, a marqué les esprits par ses pratiques inédites, à tel point qu’on nomme « ubérisation » le vaste mouvement de précarisation du travail que la révolution numérique n’a fait qu’amplifier. Ce livre propose d’entrer dans le vif du fonctionnement des plateformes qui, à l’instar d’Uber, magnifient le modèle de l’autoentrepreunariat et bousculent le droit du travail. La mutation engagée n’est pas mince : elle touche des chauffeurs, des coursiers, des ouvriers en logistique, des femmes de ménage, des restaurateurs, qui ont aujourd’hui des algorithmes pour contremaîtres. L’originalité de l’ouvrage tient moins en réalité à l’évocation de ces univers gouvernés par l’intelligence artificielle qu’à la multiplication des regards croisés. En plus d’entretiens avec des chercheurs et chercheuses spécialistes du sujet, le livre offre un bouquet de témoignages et d’analyses d’acteurs et actrices de terrain (une propriétaire de restaurant, un coursier à vélo syndicaliste, un collectif de livreurs autonomes), ainsi que de femmes et hommes politiques de gauche. Dans un style alerte, qui ne cède rien à la rigueur du propos, ces regards croisés aident non seulement à décrypter le sens du tournant numérique actuel mais aussi, sur un mode engagé, à définir ce que le travail de demain pourrait et devrait être.