Le trou noir de la dépression

La dépression ne se résume pas à la tristesse : ses manifestations, très variables, peuvent altérer l’ensemble du quotidien, depuis le sommeil et l’appétit jusqu’à la vie sociale.

L’existence des états dépressifs est attestée dans les plus anciens textes médicaux de l’Antiquité. Ce trouble mental, appelé mélancolie jusqu’au XIXe siècle, a été universellement observé au fil du temps et à travers l’espace. La dépression fait partie des troubles de l’humeur, « cette disposition affective fondamentale, riche de toutes les instances émotionnelles et instinctives, qui donne à chacun de nos états d’âme une tonalité agréable ou désagréable, oscillant entre les deux pôles extrêmes du plaisir et de la douleur », comme la définissait le psychiatre français Jean Delay.

 

Une tristesse inhabituelle, profonde, générale

Décrire les symptômes de la dépression est une tâche ardue, car elle revêt des aspects différents selon les patients. Dans sa forme la plus typique, elle se caractérise par une tristesse inhabituelle, profonde, générale. On parle aussi de douleur morale, pour en souligner le caractère très pénible et parfois insoutenable. Le sujet déprimé éprouve un sentiment de culpabilité, d’incapacité, de déchéance. Il ne trouve plus goût ni intérêt à rien. Il perd tout espoir, a une vision négative de l’avenir, de lui-même et du monde. Cette tristesse s’accompagne très souvent d’angoisses et d’idées suicidaires. Le suicide, aboutissement « logique » de la psychologie dépressive, fait toute la gravité de cette affection.

La dépression entraîne un ralentissement des processus psychiques et moteurs. Le sujet déprimé éprouve de grandes difficultés à se concentrer, à fixer son attention, à rassembler ses idées, à ranimer ses souvenirs. Il est indécis et se sent dépourvu de volonté. Les gestes sont lents, la mimique est pauvre, la parole rare, le tonus musculaire relâché. L’état dépressif s’accompagne immanquablement d’une grande lassitude physique, d’un épuisement rendant tout effort coûteux, voire impossible. Dans l’immense majorité des cas, l’appétit est diminué et le sommeil réduit. Les altérations du sommeil se manifestent moins par des difficultés d’endormissement que par des réveils en milieu ou en fin de nuit. En revanche, une fois sur cinq, la dépression s’accompagne d’une augmentation de l’appétit et d’un allongement de la durée du sommeil. En règle générale, les symptômes sont à leur maximum le matin au réveil, et vont en s’atténuant à mesure que la journée avance. Le retentissement de la dépression sur la vie personnelle et professionnelle est marqué. Le sujet déprimé se replie sur lui, évite les contacts sociaux. Le rendement professionnel est diminué, et un arrêt de travail est le plus souvent justifié. Les états dépressifs s’installent habituellement en quelques jours, et, en l’absence de prise en charge, durent plusieurs mois. Sous traitement, l’amélioration survient en quelques semaines.