Les idées politiques, une affaire de famille ?

La famille joue-t-elle encore un rôle dans la fabrique des identités politiques des individus ? Même si ses contours ont changé et si ses formes se sont diversifiées, le cadre familial reste un lieu décisif de socialisation politique. Aujourd’hui, un Français sur deux reconnaît s’inscrire dans la continuité idéologique de ses deux parents selon une mesure prenant en compte la tripartition gauche, droite, ni gauche ni droite, tandis que les cas de rupture franche, se marquant par un changement de camp politique, ne concernent qu’un peu plus d’un Français sur dix. Le restant est constitué soit des cas de filiations complexes liées à la divergence des choix politiques entre les deux parents, soit du décrochage des options politiques de gauche ou de droite des parents au travers du refus par leur progéniture de se situer personnellement entre la gauche et la droite 1.

Entre les générations se tisse une trame fixant les héritages, les adaptations ou les apports nouveaux qui font et défont les filiations politiques et qui conditionnent toujours fortement le rapport des individus à la politique. Dans la sphère privée, la politique produit des échanges, des prises de parole et de position, mais aussi des affrontements, qui sont autant de terrains d’expérience de l’aventure démocratique. Les convictions, parce qu’elles sont au cœur de ce qui fait l’identité intime de chacun, ont une forte composante affective. L’attachement des enfants à certaines valeurs portées par leurs parents est davantage fondé sur des affects que sur des démonstrations rationnelles. De plus, la famille s’est désinstitutionnalisée mais elle se trouve surinvestie affectivement. C’est sans doute pour cela que la transmission politique familiale continue d’opérer malgré l’affaiblissement des allégeances (encadré ci-dessous).