Sciences Humaines : Le 28 juin dernier, la Constitution française a été révisée par le Parlement : l'amendement qui vient d'être voté stipule que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ». Pourquoi a-t-il été nécessaire de légiférer sur la parité hommes/femmes en politique ?
Janine Mossuz-Lavau : Depuis qu'elles ont obtenu le droit de vote en 1944, les Françaises sont devenues des citoyennes à part entière : elles votent maintenant autant que les hommes. En ce qui concerne l'éligibilité, le bilan est beaucoup plus contrasté. Nous sommes toujours l'avant-dernier pays d'Europe (avant la Grèce) dans la représentation politique des femmes, avec une représentation de 10 % de femmes à l'Assemblée nationale.
Plusieurs facteurs expliquent ce retard. D'une part, des facteurs historiques : la Révolution française a donné la citoyenneté exclusivement aux hommes, et il a fallu cent cinquante ans pour remonter ce retard. D'autre part, les partis politiques sont restés longtemps des cénacles masculins, qui se reproduisaient à l'identique et manifestaient une certaine mauvaise volonté à y laisser entrer les femmes. Il existe aussi en France une responsabilité du mouvement féministe, qui a privilégié d'autres enjeux (l'avortement, le travail féminin, les tâches domestiques...) et ne s'est pas préoccupé du pouvoir politique.