Psychologie et neurosciences. Une autre conception de la nature humaine

Grâce aux développements de la neuroimagerie, la fin du XXe siècle a vu exploser les recherches consacrées au cerveau. Le voir fonctionner, c’est mieux comprendre comment l’humain perçoit, pense, ressent.

Dès 1959, le linguiste Noam Chomsky, l’un des principaux acteurs de la révolution cognitive et l’inventeur de la linguistique moderne, soutenait que l’acquisition du langage par le tout jeune enfant ne pouvait s’expliquer qu’à partir de capacités présentes dès avant la naissance (même si elles devaient ensuite se développer au contact de l’environnement). On sait maintenant la fortune qu’a connue l’hypothèse de N. Chomsky en psychologie : le contenu de l’état initial n’a cessé de se préciser et de s’enrichir, bien au-delà de la faculté de langage. Des expériences ont montré que l’enfant de quelques semaines possède déjà un savoir naïf, une connaissance implicite des propriétés physiques des objets, qui lui permettent d’organiser le monde qu’il perçoit.

Les études du fonctionnement cérébral (le terme de neurosciences n’apparaîtra que vers 1970) suivaient une voie parallèle. À la même époque, en effet, David Hubel et Torsten Wiesel avaient entrepris l’étude du cortex visuel du chat. En 1963, ils constataient que les réponses neuronales à un monde visuel structuré étaient présentes dès la naissance. D. Hubel et T. Wiesel (prix Nobel en 1981), en démontrant l’existence d’un état neuronal initial indépendant de l’expérience sensorielle, étaient donc en parfait accord avec la thèse chomskienne du développement cognitif, à laquelle ils apportaient une confirmation biologique.

La notion d’un état initial, cognitif et cérébral, a rapidement débordé la période de développement pour s’étendre à l’ensemble des sciences de la cognition et du comportement. De la même façon que l’esprit de l’enfant a déjà un contenu à la naissance, l’esprit du sujet adulte devait lui aussi posséder un contenu mental indépendant des influences extérieures.

• Noam Chomsky, 1968, rééd. Payot, 2001.• Jean-Pierre Changeux, 1983, rééd. Hachette, 1998.• Oliver Sacks, Seuil, 1985.• Gerald M. Edelman, 1992, rééd. Odile Jacob, 2008.• Anttonio Damasio, 1994, rééd. Odile Jacob, 2008.• Nathalie Tzourio-Mazoyer, Bernard Mazoyer, Olivier Houdé, Puf, 2002.• Marc Jeannerod, Odile Jacob, 2005.