S’il fallait résumer le Discours de la méthode en peu de mots, disons que cela débute par un peu d’autobiographie (partie I), se poursuit par un zeste de méthode (partie II), une morale provisoire (partie III), un bout de métaphysique où est démontrée l’existence de soi (le cogito) et de Dieu. L’œuvre se termine par un projet posthumaniste et un appel au mécénat.
Le Discours s’ouvre donc sur un début d’autobiographie où Descartes raconte ses études à La Flèche, ses déceptions et ses critiques à l’égard de l’enseignement scolastique qu’il y a reçu. Suit le récit de ses voyages qui lui ont fait prendre conscience de la relativité des coutumes.
La deuxième partie est proprement méthodologique. Le projet général est de refonder le savoir – tout le savoir – sur de nouvelles bases. Pour cela, nous dit Descartes, il faut douter de tout, faire table rase de nos savoirs puis tout reconstruire pas à pas grâce à la seule puissance de la raison.
À force de commentaires sans fin sur ce fameux Discours, on en vient à oublier de se poser cette question simple : « Au fait, est-ce que ça marche ? »
Est-il vrai qu’en remettant tout en cause, puis en s’aidant de quelques règles de méthode bien choisies, on parvienne tout seul à reconstruire le monde entier, du mouvement des planètes à une nouvelle médecine en passant par les lois de la lumière ? La réponse est non. Et voici pourquoi.
Galilée et le système héliocentrique
Tout d’abord, on ne peut pas comprendre le Discours de la méthode sans rappeler ceci : ce n’est pas un livre mais une préface. La préface à trois essais scientifiques (Dioptrique, Météores et Géométrie) qui sont eux-mêmes des extraits d’un Traité du monde que Descartes a renoncé à publier en entier. Mais il est justement impossible de comprendre la méthode de Descartes en l’isolant de ce Traité. Ainsi, l’invitation au « doute hyperbolique » ne peut se comprendre sans référence à la physique de Galilée. Celle-ci s’est construite en partie en rupture avec l’observation. Chacun voit le Soleil tourner autour de la Terre, alors que le physicien sait que c’est l’inverse. Cela, Descartes ne peut l’écrire. En effet, il s’est rallié aux thèses de Galilée sur le système héliocentrique. Mais ce dernier a été condamné quelques années plus tôt pour avoir soutenu le système héliocentrique (et avant lui Giodarno Bruno a été brûlé vif pour la même raison). Méfions-nous donc des apparences, dit Descartes, et partons de ce doute pour aller plus loin.