Vu de l’extérieur, l’extrémisme politique est indéfendable : c’est le mal par excellence, une idéologie que seuls des marginaux, des criminels ou des fous peuvent sérieusement rallier… Le problème est que sur le moment personne ne se voit ainsi. « Nul n’est méchant volontairement », écrivait Platon : personne ne prétend vouloir le mal pour le mal, mais toujours pour le bien. Cette illusion est le premier motif d’adhésion à des idéologies néfastes. Aujourd’hui, selon le dernier rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, un Français sur dix se déclare « plutôt raciste » et un sur quatre, « un peu raciste ». Mais ça n’est jamais sans mettre en avant une vision de la France plus unifiée, moins fragmentée, moins sujette aux dérives qu’ils attribuent aux étrangers… De leur point de vue, ces racistes avoués plaident pour « une vie meilleure ». Pour le comprendre, il faut accepter de se placer de leur point de vue.
Le politologue Jean-Yves Camus identifie trois facteurs associés à la montée actuelle des extrémismes en Europe : le rejet croissant de la mondialisation, qui pousse chacun à mettre son pays ou sa région au-dessus de tout ; le refus de la « société multiculturelle », nourri de l’idée que tous les peuples ne devraient pas se mélanger et que certains modes de vies sont incompatibles ; enfin, une crise économique violente et durable, qui pousse les plus démunis à vouloir essayer d’autres solutions politiques que celles proposées sur l’échiquier traditionnel.