Un continent de colonies

Engagée dès le 15e siècle, la colonisation de l’Afrique s’accélère à la toute fin du 19e. En moins de vingt ans, la part de territoires colonisés passe d’environ 10 % à 90 %. Retour sur ces événements.

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Sous couvert d’arguments religieux, humanistes et civilisateurs, la colonisation du monde par l’Europe est, dès ses débuts, essentiellement motivée par la recherche de nouvelles ressources. Ce mouvement, entamé aux 15e et 16e siècles dans les Amériques, concerne également, dès cette période, le sol africain. Grâce à ses excellents navigateurs, le Portugal est le premier pays européen à longer vers le sud les côtes africaines. Il y installe des missions catholiques, et y fonde des comptoirs à des points stratégiques, comme à Ceuta au Maroc (1415), où aboutit alors la route transsaharienne.

Comptoirs et traite esclavagiste

Ces comptoirs, souvent proches des premières missions, sont des structures coloniales à vocation commerciale, créées pour favoriser les échanges entre métropoles et régions avoisinantes, sans pourtant exercer une autorité politique directe : il s’agit avant tout d’avoir accès aux matières premières. Le Portugal établit ainsi des comptoirs sur les îles atlantiques, en Afrique de l’Est et sur les rivages du golfe de Guinée, et dès le 16e siècle s’installe en Angola et au Mozambique. De son côté, l’Espagne implante des comptoirs au Maroc et en Algérie et colonise le Sahara occidental.

Les Européens s’intéressent aux ressources telles que le coton, le cacao, le bois, le caoutchouc mais aussi aux hommes, pour fournir en esclaves les plantations des Amériques. Les Portugais développent la traite sur les côtes des actuels Ghana, Togo, Guinée et fournissent des esclaves au Brésil. Du côté espagnol, l’occupation relativement tardive de la Guinée en 1858 et la fin de la traite vers Cuba coïncident avec son relatif retrait d’Afrique.

La France installe ses premiers comptoirs africains à partir du 17e siècle (Saint-Louis du Sénégal, 1659). Après la perte de ses colonies nord-américaines en 1763, à l’issue de la guerre de Sept Ans, elle se déploie en Afrique du Nord. L’expédition d’Alger en 1830 débouche sur la longue histoire coloniale franco-algérienne, et le contrôle du Maroc et de la Tunisie.

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La principale rivale de la France est la Grande-Bretagne. Ses marchands opèrent depuis le 16e siècle en Gambie, puis deux siècles plus tard en Sierra Leone, pays devenu officiellement colonie britannique en 1808 pour accueillir des esclaves affranchis. Durant la première moitié du 19e siècle, la Grande-Bretagne, championne du commerce et du libre-échange, profite de l’effacement des empires perse, ottoman et chinois pour étendre ses positions en Asie, tout en développant ses intérêts en Afrique : l’Égypte, le Soudan sont ses principales zones d’influence. Au sud du Sahara, avec ses compagnies privées à charte qui développent le commerce, elle investit les côtes et se fixe au Nigeria (1861) avant de fonder la Côte de l’Or (1874, Ghana).

Les comptoirs constituent donc une première étape de la colonisation en Afrique, avec la traite esclavagiste comme activité la plus lucrative. La période 1820-1830 représente un basculement. La poussée du courant abolitionniste marque les esprits européens en même temps que se répand une ardeur coloniale dans les opinions publiques grâce aux lobbies des armateurs et des entrepreneurs. Dans ce contexte, l’abolition de l’esclavage (1833) en Grande-Bretagne, l’action de la British and Foreign Anti-Slavery Society (1839) et l’abolition décrétée par la France en 1848 annoncent une réorientation vers la colonisation territoriale et l’exploitation systématique du continent noir. La dynamique coloniale européenne évolue.