Le miroir en obsidienne de John Dee (1527-1608 ou 1609), astrologue de la reine d’Angleterre Élisabeth Ire, est un des objets les plus célèbres de la galerie des Lumières du British Museum de Londres. Une des raisons de la fascination pour cet objet est son utilisation par le conseiller royal, adepte de l’occultisme ; une autre, sa probable origine aztèque. Mais les circonstances de l’arrivée de ce miroir en Europe, et surtout ses origines, étaient jusqu’à présent mal documentées.
Pour en avoir le cœur net, une équipe de chercheurs a étudié sa composition chimique, ainsi que celle d’autres miroirs similaires, à l’aide d’une spectrométrie de la fluorescence des rayons X, pour en déterminer l’origine géologique. Cette analyse montre que le miroir de J. Dee a bien été fabriqué avec de l’obsidienne d’origine mexicaine, provenant de Pachuca, un site d’extraction au sein du territoire aztèque. Matériau aux usages variés, l’obsidienne est notamment associée chez les Aztèques au dieu Tezcatlipoca, « miroir fumant » en langue nahuatl, et dont un des attributs est la prédiction de l’avenir au moyen de son miroir. Passionné par les découvertes du Nouveau Monde, J. Dee a-t-il choisi à dessein cet objet emblématique pour ses pratiques occultes ? Ces usages anciens se sont-ils perdus avec la traversée de l’Atlantique ? Autant de questions soulevées par un artefact aujourd’hui exposé au British Museum comme un objet européen, mais en réalité témoin des échanges déjà riches entre les deux continents.
Source : Stuart Campbell Elizabeth Healey., « The mirror, the magus and more : reflections on John Dee’s obsidian mirror », Antiquity, octobre 2021.