Vers une science économique unifiée ?

Qu’ont en commun tous les courants critiques de la théorie économique dominante ? C’est ce que le sociologue Alain Caillé a récemment tenté de mettre en évidence dans un texte-manifeste signé par des chercheurs de divers horizons. Objectif : proposer une alternative commune.

Sociologues de l’économie, économistes hétérodoxes conventionnalistes ou régulationnistes, voire marxistes ou postkeynésiens… Les critiques de la théorie économique dominante ne manquent pas. Mais si elles n’ont pas jusqu’ici réussi à changer l’ordre des choses, c’est entre autres parce qu’elles se présentent en ordre dispersé. Toutes ces écoles et courants ont des arguments sérieux pour critiquer le modèle standard en économie, mais ils le font chacun à partir de leurs propres postulats et peinent à se rassembler pour proposer une alternative commune.

 

Les institutions comptent

C’est ce qui fait toute la valeur du « Quasi-manifeste institutionnaliste » rédigé par le sociologue Alain Caillé en 2007, et signé notamment par deux représentants des principaux courants hétérodoxes français en économie, Olivier Favereau (courant des conventions) et Robert Boyer (école de la régulation) (1). Son but : mettre en évidence les théories et les thèses que partagent tous ceux qui ne se reconnaissent pas dans le modèle standard en économie, « par-delà la diversité de leurs trajectoires, de leurs écoles de pensée, de leurs cultures ou de leurs localisations géographiques ». Car A. Caillé, principal animateur du Mouvement anti-utilitariste dans les sciences sociales (Mauss), s’en est aperçu à l’occasion d’interventions à l’étranger, en compagnie de quelques-uns des signataires du manifeste, où ils étaient invités à présenter leurs travaux : « Fondamentalement, on dit la même chose », découvrait-il. Leurs interlocuteurs chinois ou indonésiens semblaient le penser aussi, qui les invitaient à se ranger sous la bannière d’une « french political economy » et à mettre l’accent sur ce qu’ils avaient en commun. C’est de cette expérience qu’est né le manifeste, que chacun est désormais invité à signer s’il s’y reconnaît (2).