Conseil national des femmes françaises, le temps de la réforme

Créé au début du 20e siècle, le Conseil national des femmes françaises a fédéré de nombreuses associations et relayé les revendications pour les femmes auprès des hommes politiques.

Le Conseil national des femmes françaises (CNFF) existe depuis 1901. Il s’agit d’une fédération d’associations, affiliée à une organisation internationale : le Conseil international des femmes (CIF, encadré ci-dessous). Les trois fondatrices du CNFF sont protestantes : Isabelle Bogelot (présidente d’honneur), Sarah Monod (présidente jusqu’en 1912) et Julie Siegfried (vice-présidente puis présidente de 1912 à 1922). Leur objectif est de regrouper le maximum d’associations. Pour ce faire, le conseil utilise différents moyens de propagande : articles dans la presse généraliste et spécialisée, brochures, conférences, congrès, enquêtes, pétitions et tracts. À partir de 1909, le CNFF produit un bulletin mensuel intitulé L’Action féminine.

Le CNFF se déclare apolitique et neutre, suivant le modèle du CIF. Ces principes sont à double tranchant : s’ils leur permettent de fédérer un nombre important d’associations, ils peuvent aussi être un frein en privant d’éventuels soutiens d’associations de femmes liées à des partis politiques ou à des religions telle la Ligue féminine d’action catholique française qui compte, en 1939, deux millions d’adhérentes 1. Quoi qu’il en soit, en France, en 1901, le CNFF parvient à fédérer la majorité des associations féministes et des groupes de femmes, ce qui porte dès le début le nombre total de ses membres à 28 000 2. Ce nombre s’élève d’après le CNFF jusqu’à 200 000 en 1939 et marque son apogée 3.

Contre le code napoléonien

Le CNFF veut « améliorer le sort de la femme au point de vue éducatif, économique, social, philanthropique ou politique ». Vaste programme calqué sur celui du CIF dont l’originalité réside dans le fait que « c’est la seule association qui défend un programme universel et particulièrement large 4 ». Les revendications du CNFF sont très nombreuses et concernent les droits civils, politiques et sociaux des femmes. Le centenaire du code civil en 1904 est l’occasion de protester contre ce code napoléonien qui traite les femmes en mineures et influence d’autres codes civils en dehors de l’Hexagone (notamment en Italie avec le code Pisanelli de 1865 et au Portugal avec le code Seabra de 1867). La question de l’éducation des femmes est également le cheval de bataille du CNFF ainsi que celle de leur droit au travail et à la protection de la maternité. Les intitulés de ses sections sont révélateurs de la diversité des préoccupations : assistance, hygiène, éducation, législation, paix, suffrage, travail, « suppression de la double morale et de la traite des femmes », cinéma, radio, presse, lettres et arts. La stratégie adoptée se veut réformiste : le CNFF recherche le soutien des hommes politiques. Il parvient à agir sur la législation en entretenant des relations étroites avec certains parlementaires et en fonctionnant comme un groupe de pression. Une caractéristique du CNFF est son pragmatisme et son souhait de procéder par étapes. Il est un interlocuteur reconnu auprès des pouvoirs publics : la participation de personnalités politiques à ses congrès l’atteste. Le Conseil fonctionne comme un lien entre la société civile et l’État, pendant une période où les Françaises n’ont pas le droit de vote, droit qu’elles n’obtiendront que tardivement, en 1944. Des conflits surgissent sur cette question du droit de vote des femmes lors d’un congrès du CIF qui se tient à Berlin en 1904. Il en résulte la création de l’Alliance internationale pour le suffrage des femmes (AISF) qui, comme son nom l’indique, se concentre sur l’obtention du droit de vote des femmes et se développe séparément du CIF, même si pendant l’entre-deux-guerres il est question, sans succès, de les fusionner