Grandir : à chacun son rythme

Le développement d’un enfant est jalonné de normes : il doit savoir parler à tel âge, lire et compter à tel autre… Les enfants qui sortent du cadre risquent de se retrouver en marge des bancs de l’école.

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Dès son plus jeune âge, les enseignants ont prédit à Bastien une vie ponctuée d’échecs et de difficultés scolaires. « Ne vous faites pas trop de faux espoirs, ont-ils dit à ses parents. S’il atteint le CM2, c’est déjà bien. S’il dépasse le collège, ce serait un miracle ! » Il faut dire que Bastien souffre d’une dyslexie et d’un TDA (trouble déficitaire de l’attention) avec hyperactivité. Une dizaine d’années de lutte, de sacrifices et de prise en charge plus tard, Bastien intègre une grande école de commerce. Aujourd’hui, cet élève, qui n’était pas censé dépasser le CM2, a fondé une entreprise de communication et dirige une équipe de vingt personnes. Et quand vous lui demandez ce qui lui a permis de s’extraire de la case « sans espoir » dans lequel on l’avait condamné étant enfant, Bastien vous répond : « Mes parents. » Ils ont déménagé pour se rapprocher des meilleurs spécialistes, pris des jours de congé pour se former à l’accompagnement d’enfants atypiques et contracté des crédits pour financer les prises en charge. À l’inverse des enseignants, leur regard sur leur fils a toujours été pétri d’espoirs. La victoire de Bastien est, au final, la victoire de toute sa famille.

Cette délicate frontière entre le normal et le pathologique

Les enfants qui, comme Bastien, s’écartent des normes et grandissent en « décalé » ne sont pas rares. 1 à 10 % des enfants souffrent d’un trouble « dys », 18 % sont concernés par un problème de développement. Et, si l’on inclut les problématiques émotionnelles et comportementales, cette prévalence grimpe à 22 % ! Ces trajectoires développementales considérées comme « hors normes » sont multifactorielles : elles reposent sur la maturation cérébrale de l’enfant, certes, mais également sur les composantes sociales, adaptatives, culturelles et familiales de son environnement. Au vu de la multiplicité des profils de ces enfants, une question reste en suspens : la frontière entre le normal et le pathologique est-elle aussi objective et infaillible qu’on pourrait le croire ? Non, bien entendu. Cette même frontière, qui a toujours fait l’objet de débats chez les scientifiques, demeure tributaire d’une société, d’une époque, d’un ensemble d’attentes déterminées à l’égard du développement et du comportement des enfants.