Grands-parents : trouver la bonne distance Entretien avec Claudine Attias-Donfut

À la fin des années 1990, les grands-parents étaient les grands oubliés des études sur la famille, confie Claudine Attias-Donfut. Aujourd’hui, les choses ont bien changé ! La démographie a sa part de responsabilité dans l’affaire. Depuis une cinquantaine d’années, une augmentation inattendue et sans précédent de la longévité s’est produite. La génération du papy-boom constitue 25 % de la population européenne. La durée de vie en tant que grands-parents est de 25 ans en moyenne, un tiers de leur vie de femme pour les grands-mères… « Toutes les enquêtes européennes montrent que les grands-parents ont pris un rôle très important dans la famille », ajoute C. Attias-Donfut. D’une part, ils peuvent suivre leurs petits-enfants de la naissance à l’âge adulte. D’autre part, ces ex-baby-boomers se distinguent en bien des domaines de la figure des grands-parents d’antan…

 

Vos travaux ont montré que les grands-parents actuels ont un rôle de soutien pour les enfants et petits-enfants ? En quoi consiste-t-il ?

Le développement de la protection sociale a complètement transformé les rapports entre générations. Aux 18e et 19e siècles, la figure du grand-parent existait seulement dans les classes aisées. Dans les classes populaires, on travaillait jusqu’à épuisement et c’était alors les enfants qui vous prenaient en charge. C’est d’ailleurs un modèle qui prévaut encore dans les pays les moins développés, en Afrique notamment.

La protection sociale (retraite) a libéré du temps et des moyens pour les générations âgées. Depuis vingt ans, les grands-parents se sont autonomisés d’un point de vue financier et les transferts se font des plus âgés aux enfants et petits-enfants même dans les familles les plus modestes. Les aides monétaires permettent, par exemple, de financer l’installation des enfants dans un nouveau logement, les études des petits-enfants. Dans une enquête faite aux Antilles, on a observé que beaucoup de petits-enfants, après leurs études, allaient vivre chez la grand-mère lorsqu’ils ne trouvaient pas de travail. Même dotée simplement du minimum vieillesse, c’est elle qui abrite et nourrit ceux qui sont en difficulté. On trouve cette inversion des transferts entre générations dans tous les pays européens.