«L'intention est la clé de la concentration» Rencontre avec Jean-Philippe Lachaux

Se concentrer nécessite de multiples activités cérébrales : définir un objectif, sélectionner les informations pertinentes pour y parvenir, mettre en place une série d’actions dans ce but et, surtout, savoir résister à la dispersion.

Attention, concentration… Quelle est la différence ? Et sait-on aujourd’hui comment fonctionne la concentration ?

Les neurosciences étudient principalement l’attention. La concentration l’est très peu. Pourtant, selon moi, il y a une vraie différence entre attention et concentration. Dans la concentration, il y a toujours l’idée de processus actif du cerveau. Il essaie de faire quelque chose à partir de l’information qui arrive à ses sens. Par contre, l’attention, c’est la sélection d’informations sensorielles. Par exemple, je me concentre pour lire un livre, mais je peux porter mon attention sur un livre pour regarder sa couleur, sa taille… La concentration implique un traitement actif de ce que l’on perçoit, pas seulement une réception d’informations.

Comment fait-on pour se concentrer ?

La clé de la concentration, c’est l’intention. L’intention guide tout ce que le cerveau met en marche pour être efficace, notamment l’attention et la sélection des informations. C’est pourquoi on ne peut être concentré que si l’on a une intention très claire concernant ce que l’on cherche à faire. Quand on doit accomplir une activité qui nécessite de la concentration, la première chose à faire est de chercher à avoir le plus clairement à l’esprit ce qu’on veut faire. Quel est le résultat que je vise ? Qu’est-ce que je dois faire dans ce but ? Cette opération mentale permet au cerveau de déterminer chaque seconde ce qui est important de ce qui l’est moins, donc d’avoir une attention optimale. C’est l’inverse du multitâche où l’on fait plein de choses en même temps, en se noyant un peu.

Il arrive parfois d’avoir une intention, sans réussir à se concentrer pour y parvenir. Comment expliquer que la concentration ne soit pas toujours optimale ?

Quand on est soumis à plusieurs tâches à réaliser, ce qui est souvent le cas, le risque est le zapping, comme lorsqu’on regarde la télévision alors qu’on est fatigué. Le but est de se distraire. Au bout d’un moment, on a l’impression d’avoir compris de quoi parle l’émission, d’en avoir fait le tour. On a envie de changer de chaîne parce qu’on a l’impression qu’on passe à côté d’autre chose tout aussi intéressant si on ne le fait pas. Il y a peut-être encore plus distrayant ailleurs ? De la même façon, c’est ce qui se passe presque automatiquement quand on est débordé. On travaille un peu sur une tâche. Quand on a l’impression d’avoir avancé, le cerveau dit « Attention à ne pas oublier ça aussi ». On bascule alors vers une autre tâche ou alors on s’interrompt pour lire un mail car on pense que c’est important. Sous l’effet de la fatigue, la bascule d’une tâche à l’autre se passe de manière anarchique, sans vraiment finir ce qu’on a à faire. C’est inefficace et fatigant.