La biologie des liens affectifs Entretien avec Robin Dunbar

Pour Robin Dunbar, chercheur émérite en psychologie évolutionniste à l’université d’Oxford, nos amitiés dépendent pour une bonne part du fonctionnement de notre cerveau, et font, en retour, du bien à notre corps.

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Votre nom reste attaché à une estimation du nombre maximal d’amis, le « nombre de Dunbar ». Comment le calculez-vous ?

Il y a de nombreuses années, j’ai voulu comprendre ce qui déterminait la taille des groupes sociaux chez les primates. La thèse de l’« intelligence machiavélienne », selon laquelle ils ont besoin d’un gros cerveau pour gérer leurs relations au sein de grands groupes complexes, venait d’être formulée 1. J’ai émis l’hypothèse, qui s’est confirmée, d’une corrélation entre taille du cerveau et taille du groupe, puis je me suis demandé à quelle taille de groupe cela conduirait pour les humains. J’ai abouti au nombre de 150 personnes, environ trois fois plus que chez les primates les plus sociables.

Je me suis mis en quête de données pour le confirmer, d’abord dans les sociétés de chasseurs-cueilleurs, qui étaient organisées en tribus d’environ 1 500 personnes elles-mêmes sous-divisées en clans d’environ 150, puis dans nos sociétés contemporaines. L’analyse de la base des données téléphoniques d’un grand pays européen a, par exemple, montré que la taille moyenne d’un carnet d’adresses, comprenant à la fois amis et famille étendue, est très proche de 150, de même que le nombre moyen d’amis sur un compte Facebook.

Ces 150 amis ne se valent bien sûr pas…

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Ce nombre comporte une série de cercles cumulés qu’on peut comparer aux ondes d’un étang dans lequel vous jetez une pierre. L’onde la plus proche est la plus petite, mais forme la vague la plus haute, et plus on s’éloigne, plus l’onde s’élargit et la vague décroît. La largeur de l’onde, c’est le nombre de personnes dans chaque cercle ; la hauteur de la vague, la force de votre lien émotionnel avec ces personnes.