Commençons par un retour en arrière. Qui aurait pu, il y a cent ans, imaginer ce que deviendrait la psychologie du xxe siècle ? En septembre 1909, Sigmund Freud, qui a alors 52 ans, est invité aux États-Unis, à la Clark University, pour présenter la psychanalyse qui commence à faire beaucoup parler d’elle. Il est accompagné de Carl Jung (qui passe alors pour son héritier, alors qu’ils vont se disputer et se séparer deux ans plus tard). Dans le public figure William James, pionnier de la psychologie américaine et sommité de sa discipline. Les autres psychologues présents, tous plus ou moins pionniers dans leur domaine, s’intéressent aussi à bien d’autres sujets en friche. Comme les tests d’intelligence, qui viennent d’apparaître avec Alfred Binet, et que l’on s’active à transformer (le QI verra le jour en 1911). D’autres se penchent sur les travaux du Russe Ivan Pavlov, qui a reçu le prix Nobel en 1904 pour ses découvertes sur le conditionnement : l’idée du « behaviorisme » est alors en germe, même si le mot ne s’est pas imposé. Stanley Hall, qui a organisé la rencontre avec Freud, est quant à lui un pionnier de la psychologie de l’adolescence. L’époque était donc riche de promesses pour la discipline en voie de constitution, et nul ne pouvait prévoir la suite.
Un siècle plus tard, ou en sommes-nous ? La psychologie est désormais solidement instituée. Implantée à l’université, dans les hôpitaux psychiatriques, les centres d’aide psychologique, les lieux d’écoute, mais aussi dans l’édition, les revues et magazines (p. 80)… Quelques chiffres éloquents : il existe 120 000 psychologues aux États-Unis, et 35 000 en France qui officient dans la recherche, l’enseignement, l’éducation ou la psychothérapie.