Les avions fonctionnent à l’hydrogène, mais le prix prohibitif des billets oblige la majorité des voyageurs à se déplacer en bateau ou en TGV. La seule difficulté avec le train est que les voyages ne sont possibles que la nuit, les solutions techniques pour fabriquer des caténaires qui résistent aux intenses chaleurs de la journée tardent à émerger. Mais ce nouveau monde bioclimatique présente bien des avantages. Au printemps, par exemple, les fleurs des toits végétalisés se reflètent sur les panneaux solaires : la couleur est partout. À Paris, les zones maraîchères alternent harmonieusement avec les champs de coton, et, dans les zones tropicales d’Australie, les éléphants ont enfin été introduits…
Dans une très courte nouvelle, en conclusion d’Une brève histoire du climat, Frédéric Denhez (1) anticipe notre quotidien à l’horizon 2050. Car, quels que soient les taux de réductions de CO2 que l’on atteindra, le gaz déjà accumulé dans l’atmosphère combiné avec l’inertie de la Terre entraînera une augmentation des températures qui modifiera paysages et conditions de vie. Conditions déjà largement transformées. Depuis deux siècles, absorbée à la fois dans sa recherche de développement et de contrôle de son environnement, l’humanité a négligé l’écosystème qu’elle créait. Un écosystème mécanique, polluant et avide d’énergie, dans lequel la voiture ferait figure de grand prédateur d’hommes et d’espace, le téléphone mobile de parasite tandis que les milliards de ventilateurs dissimulés dans nos voitures, nos ordinateurs, nos aspirateurs ou autres systèmes de chauffage seraient autant d’acariens. Cette belle analogie n’est pourtant qu’un leurre, car « les machines ne sont pas intrinsèquement bonnes ou mauvaises. C’est l’usage que nous en faisons, le cadre que nous leur imposons qui les rendent utiles ou nuisibles (…) C’est ce cadre qui est en train d’exploser. Tout se passe comme s’il n’y avait plus de pilotes dans les “machines à gouverner les machines” que sont devenues les sociétés (2). » Nous devons aujourd’hui « regarder les machines en face », les gouverner, et les choix techniques sont à utiliser comme levier majeur de l’action politique. Selon l’économiste et urbaniste Jean Haëntjens, gouverner des machines, cela signifie avant tout s’appuyer sur quelques machines stratégiques pour transformer la société, à l’image de l’invention du conteneur qui a révolutionné le commerce mondial. Certaines de ces machines existent déjà : des véhicules urbains électriques aux trains à grande vitesse reliant les villes entre elles, nous disposons déjà d’une base sur laquelle agir, capable de déclencher des réactions en chaînes. D’autres sont à inventer, à améliorer ou à développer : les batteries associées à l’énergie solaire, de nouveaux processeurs numériques, des matériaux de construction innovants, etc.