Le sport, un exercice spirituel ?

Le sport a pris une importance 
considérable dans les sociétés contemporaines. Pourquoi tant d’efforts ?


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Levons d’emblée une ambiguïté, toute activité physique n’est pas du sport. Dès lors, la question des supposés bienfaits du sport sur le développement intellectuel, cognitif, spirituel ou moral rencontre l’épineuse question des finalités de l’exercice physique, tout autant que celle de la polysémie d’un terme : sport. L’entrelacs des projets militaires, hygiénistes, pédagogiques et athlétiques qui a gouverné l’entraînement physique pendant des siècles a produit le terreau d’héritages contradictoires : l’effort physique, pour quoi ? Pour combattre à la guerre ou préserver sa santé ? Pour bonifier l’éducation intellectuelle ou offrir une catharsis aux foules ? Pour atteindre à l’exploit ou cultiver la juste mesure ? Sans doute un peu de tout cela, tantôt ensemble, tantôt jusqu’à l’antagonisme. Quand le sport croît dans son succès, à la charnière des 19e et 20e siècles, on oppose le « sport » et l’« éducation physique ». D’un côté, la performance, de l’autre, la santé, l’hypertrophie musculaire contre les qualités foncières, le mercantilisme contre l’altruisme.

Au-delà de l’activité physique

Impossible de questionner le sport sans ressentir l’écho de ces variations sémantiques – gymnastique, éducation physique, sport, sport de haut niveau – qui s’ancre dans l’histoire depuis l’Antiquité, tout en spécifiant des visées. De quoi parle-t-on ? Le terme « sport » fait lui-même obstacle par ces connotations, mais la difficulté est signifiante. Considérer les gymnastiques anciennes, l’éducation physique hygiéniste des 18e et 19e siècles, les gymnastiques nationalistes et le sport « anglais » aux 19e et 20e siècles, le sport de haut niveau aujourd’hui, induit en effet des réponses distinctes à la question posée. Plus avant, cette généalogie de l’objet « sport » révèle une ligne de fracture plus générale : celle qui évoque la nature de l’effort, physique comme intellectuel. Qu’appelle-t-on le dépassement de soi ?